La bêtise se met au premier rang pour être vue. L’intelligence se met en arrière pour voir.
Nous pensions manger des glaces Ben & Jerry’s cet été, comme chaque année. Elles n’ont plus le même goût. Les gourmands de Judée-Samarie devront se contenter de Strauss ou Häagen-Dazs, ou bien faire quelques kilomètres pour en acheter en territoire reconnu par nos boycotteurs. Une fois de plus, nous sommes pointés du doigt – et dire que les patrons de l’entreprise qui produit ces merveilles colorées et sucrées s’appellent Ben Cohen et Jerry Greenfeld !...
On pourrait croire que notre principal adversaire, aujourd’hui, c’est Monsieur Corona -or non. Il faut se faire une raison : nous devons accepter ce mal et apprendre à vivre avec le Covid. Nous le connaissons mieux, donc le maîtrisons mieux. Il s’accroche, nous nous protégeons, nous le combattons et nous en guérissons. Les chiffres affolent, plus impressionnants que le danger lui-même ; heureusement, les hôpitaux ne sont pas bondés de malades graves, et notre médecine est performante. Même les pays qui nous boycottent utilisent notre savoir-faire médical et technologique !
Il existe un ennemi numéro un, plus grave que le BDS, la pandémie ou les ballons incendiaires lancés depuis Gaza ; une sorte d’épidémie extrêmement contagieuse, contre laquelle nous peinons pour trouver un vaccin efficace. Il s’agit de la tendance trop facile à dénigrer l'autre : l’autre est mauvais, l’autre ne comprend rien, l’autre pense mal, l’autre veut notre mal et celui de notre pays. C’est en fait le phénomène Ben & Jerry’s, mais entre nous. Nous sommes si forts pour jeûner et pleurer la destruction du Temple, mais comment va-t-on le reconstruire si le ciment qui doit nous unir fait défaut ?
Il est vrai que la politique ne donne pas l’exemple, que les invectives et les promesses non tenues des uns et des autres n’arrangent pas les choses... Et alors ? Doit-on pour autant devenir suspicieux entre nous, nous discréditer, nous tourner le dos et nous boycotter ? Où est donc le peuple juif qui éclaire, tend la main et vole au secours des brebis égarées ?
L’escalade verbale mène inévitablement à la violence physique. Là encore, quel sinistre modèle pour nos enfants, qui nous observent et boivent nos paroles ! Il est grand temps d’apporter un antidote au cynisme et au rejet de l’autre, différent par ses actes et ses pensées. Ce remède se nomme curiosité, tolérance, compassion, compliments. Seule cette potion magique peut améliorer notre santé morale – et bien sûr aussi physique. Et si nous essayions, ne serait-ce qu’une minute par jour pour commencer, de voir uniquement le bon et le beau en l’autre, qui ne nous ressemble en rien... sinon qu’il fait partie du même peuple, Israël ?