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La criminalité dans le secteur arabe israélien fait les gros titres de la presse ces dernières semaines. En effet, plus de 100 morts violentes ont été comptabilisées depuis janvier 2023. Le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, est montré du doigt comme le principal responsable de ce fléau, ainsi que, dans une moindre mesure, le chef de la police Kobi Shabtaï. Le journaliste de la chaine Kan, Kalman Liebeskind, a publié dans Maariv un éditorial dans lequel il remet en place quelques idées reçues et dénonce la manipulation autour des faits et des chiffres par la presse israélienne mainstream et par les élus de l'opposition, juifs comme arabes.
Extraits choisis:
''Sur les faits, il n'y a pas de discussion'', écrit Liebeskind en guise d'introduction, ''La violence dans le secteur arabe augmente, le sang coule comme de l'eau et quand des citoyens innocents en paient le prix, c'est dramatique. Mais c'est de là que partent les manipulations autour des chiffres. A partir de là commence l'utilisation cynique du sang par la presse et les politiques, pour obtenir des gains politiques. Cela commence par la manière superficielle et peu sérieuse de décompter les corps. Pourquoi superficielle et peu sérieuse? Parce que s'il est vrai qu'un meurtre est un meurtre, cela ne veut pas dire que l'on peut compter un chef de la pègre sur le même plan qu'une femme poignardée à mort avec ses enfants, par son mari et qu'une jeune lesbienne qui a été tuée par balles à cause de son orientation sexuelle, uniquement parce qu'ils sont tous arabes. Ce n'est vraiment pas sérieux''.
Liebeskind cite ensuite l'exemple du ''100e assassiné'' dans le secteur arabe pour 2023 qui n'est autre qu'un voleur récidiviste, déjà condamné, qui tentait de dérober un tracteur d'une exploitation agricole et qui a été tué par des ouvriers thaïlandais avec lesquels il s'est battu pour pouvoir réaliser son objectif.
''Et qu'en est-il de Ghassan Shamsya, habitant d'Akko, ''connu des services de police'' qui a été tué à Dubaï et qui est décompté dans les morts arabes israéliens? En quoi son meurtre nous concerne-t-il? Quels sont les arguments? La police israélienne aurait dû voyager à Dubaï pour faire échouer l'assassinat?
(...) Il est vrai que dans la liste des Arabes assassinés, il se trouve des victimes qui ne sont pas des hors-la-loi. Elles représentent la réelle tragédie de la violence dans la rue arabe. Mais puisque selon la police, 67% des personnes assassinées dans ce secteur sont directement impliquées dans des affaires pénalement répréhensibles, nous ne pouvons par l'ignorer et les compter avec le pauvre enfant innocent qui a payé de sa vie pour avoir été au mauvais endroit au mauvais moment''.
Kalman Liebeskind appuie son argumentaire en comparant l'émotion suscitée par le moindre assassinat d'un Arabe israélien, membre de la pègre et celle par l'assassinat d'un délinquant juif, dans les rues d'Israël. ''Sincèrement, quelqu'un d'entre nous s'identifie à ce genre de victimes? Quelqu'un aurait prononcé son éloge funèbre? Alors pourquoi chez les Arabes c'est différent? Pourquoi nous considérons un homme de la pègre arabe éliminé comme le ''78e assassiné dans le secteur arabe'', et non comme nous aurions considéré son collègue juif qui aurait reçu le traitement qui revient à un criminel?''.
Puis le journaliste développe une analyse de ce qu'il appelle ''la culture de la violence et du meurtre au sein de la société arabe'', en citant plusieurs exemples, dont celui de Muhamad Abou Rabia, habitant de Kassifa, 28 ans, accusé du meurtre de sa soeur, mère de quatre enfants: ''Muhamad soupçonnait sa soeur de tromper son mari. Il l'a emmenée à Tel Arad, lui a attaché les mains derrière le dos à l'aide de son hijab et lui a tranché la gorge avec un sabre. Lorsqu'il a fini, il a chargé le corps dans sa voiture, et s'est rendu au commissariat d'Arad pour se livrer à la police. Mais la presse caresse le secteur arabe dans le sens du poil, même lorsqu'il représente une culture violente assoiffée de sang et accuse du meurtre la police ou le ministre de la Sécurité nationale et ne parle surtout pas de la société dans laquelle une femme est menacée d'être exécutée''.
Le journaliste poursuit en expliquant que dans la culture arabe qui place en valeur suprême ''l'honneur de la famille'', les meurtres peuvent arriver partout et contre n'importe qui. Deux tribus ou familles peuvent se brouiller pour une raison apparemment futile et elles se livrent une guerre sans merci. Lorsque la police parvient à intervenir, elle ne peut que retarder le prochain meurtre qui peut même viser un cousin qui n'a jamais été impliqué dans la dispute.
''Regardez combien de meurtres ont été commis pour des raisons futiles pendant l'année qui vient de s'écouler. Pas liés à la pègre. Juste parce que la société est violente. Comme ce jeune poignardé à mort à coups de tournevis à Shouafat pour une place de parking. Que ce soit clair, chez nous aussi, les Juifs, un tel meurtre pourrait se produire. Mais au-delà de la fréquence beaucoup moins importante, lorsque cela arrive chez nous, nous cherchons avec douleur à comprendre comment notre société en est arrivée là. Mais quand ça arrive chez eux, tout de suite arrive la question: 'Où était la police?'
(...) Il convient de souligner après avoir dit cela sur la culture, qu'au final c'est la police qui est responsable de la lutte contre la criminalité. Pas les citoyens. Elle doit tout faire pour la prévenir. Elle doit enquêter. Elle doit mettre la main sur les assassins. Cela étant dit, il existe un phénomène incompréhensible: quoi que fassent les Arabes, contre leurs voisins ou contre nous, ils sortent toujours exempts de toute reponsabilité par la couverture médiatique. Comment expliquer que lorsque les Arabes tuent des Arabes, on ne trouve aucune critique dans la presse sur... les Arabes? Après tout, même si tous les reproches faits à Ben Gvir étaient justes, ce n'est quand même pas lui qui a appuyé sur la gachette à Yafia et à Taybeh. Ce sont eux. A vrai dire, c'est un phénomène ancien dans nos médias, qui ont toujours octroyé une immunité totale au public arabe, sur tous les sujets. Les Arabes israéliens sont devenus le seul groupe qui ne paie jamais le prix public pour les actes de ses membres.
(...) Vous vous souvenez de la saison précédente de la campagne contre ''la violence des colons''? Cette semaine, je me suis interrogé, en pensant à la question de la responsabilité de la société arabe, pourquoi lorsqu'un jeune des collines agit avec violence, la presse accuse les habitants des implantations eux-mêmes de cette violence? Pourquoi chez eux, on ne peut pas, à l'instar des Arabes, jeter la responsabilité sur la police ou sur le ministre? Oui, oui sur le ministre. Nous nous rappelons tous que le précédent ministre Omer Bar Lev parlait de ''violence des colons''. Pardon, mais si Ben Gvir est responsable de la violence chez les Arabes parce qu'il est le ministre sous lequel cette violence intervient, alors Bar Lev était responsable de la violence des habitants des implantations qui s'est déroulée sous son mandat? Comment se fait-il que lorsque les Arabes commettent 100 meurtres en six mois, la police et le ministre sont coupables et lorsque des jeunes des collines jettent des pierres, ce sont les habitants des implantations qui doivent rendre des comptes? Il est clair que cela relève de la politique politicienne''.
Liebeskind cite les données du ministère de la Sécurité nationale concernant la criminalité dans le pays en 2018: 93% des infractions commises à l'aide d'une arme à feu l'ont été par des Arabes, 63% des incendies criminels ont été déclenchés par des Arabes, 47% des vols ont été commis par des Arabes alors qu'ils représentent 21% de la population israélienne.
En 2017, le nombre d'adultes arabes condamnés s'élevaient à 7.1 pour 1000 habitants, chez les Juifs à 3.2 pour 1000 habitants. En 2021, pour 1000 Arabes, 22.3 dossiers pénaux ont été ouverts chez les jeunes de 17-18 ans, chez les Juifs 9.7.
Enfin, Kalman Liebeskind démonte l'argument avancé par l'opposition aujourd'hui selon lequel lorsque Omer Bar Lev et son vice-ministre Yoav Segalovitch étaient aux commandes de la Sécurité nationale, la criminalité dans le secteur arabe a considérablement diminué. Les tenants de cette thèse s'appuient sur les chiffres globaux qui étaient meilleurs pendant toute l'année 2022 que sur le premier semestre 2023.
''Est-ce que quelqu'un de sérieux peut penser que la violence dans le secteur peut évoluer, dans le bon comme dans le mauvais sens, en un si court laps de temps? Quelqu'un pense vraiment que le nouveau gouvernement, qui est en place depuis un peu plus de cinq mois seulement, est l'explication de l'augmentation drastique des meurtres? Est-ce que quelqu'un croit que le jour où les nouveaux ministres ont prêté serment, un message a circulé sur le groupe whatsapp ''Arabes armés'', qui aurait informé ceux qui ne l'avaient pas vu aux informations que Bar Lev était parti, Ben Gvir était arrivé et que l'instant d'après, les Arabes ont commencé à se tirer dessus? C'est sérieux?
Regardez comme il est facile pour la presse de jouer avec les chiffres pour qu'ils collent à ce qu'elle veut prouver. Vous vous souvenez de l'argument selon lequel Segalovitch a fait diminuer drastiquement le nombre de meurtres dans la société arabe? Alors, regardez: Segalovitch a présenter son plan de lutte contre la criminalité dans le secteur arabe en octobre 2021. Selon les chiffres bruts, il a, apparemment, réussi. En 2020, il y a eu 128 meurtres et en 2022 ''seulement'' 114. J'ai étudié les données de 2022 mois par mois. Qu'ai-je découvert? Pendant les cinq premiers mois de l'année, on a décompté 30 meurtres dans le secteur arabe. Pendant les sept derniers mois, 84. En d'autres termes, la deuxième moitié de l'année a été beaucoup plus sanglante que la première. Qu'est-ce que cela signifie? Qu'apparemment, au fur et à mesure que le programme de Bar Lev et Segalovitch était appliqué dans la rue arabe, le nombre de meurtres a augmenté. C'est en tout cas ce que racontent les chiffres.
Mais ce n'est pas ce que cela veut dire. Ce n'est pas que Bar Lev et Segalovitch ont fait du mauvais travail. Mais cela signifie juste que tenter d'analyser des tendances profondes sur une période aussi courte est idiot, prouve un manque de professionnalisme et ne sert que des intérêts politiques''.
Le journaliste dénonce, par ailleurs, ceux qui se moquent de Ben Gvir parce qu'il n'arrive pas à imposer sa vision au sein de la police et n'a même pas l'autorité pour ordonner au commandant de la région de Tel Aviv d'empêcher les manifestants de bloquer Ayalon et par ailleurs, lui reprochent de ne pas réussir à endiguer la criminalité dans le secteur arabe. ''Décidez-vous les amis. Ou ça ou ça. Les deux ne vont pas ensemble''.
Cette mise au point de Kalman Liebeskind résonne ce matin à travers la lutte ouverte entre le ministre Ben Gvir et la conseillère juridique du gouvernement, Gali Baharav Miara, qui refuse d'autoriser la possibilité de procéder à des arrestations préventives des chefs de la pègre dans le secteur arabe.