Zichron Yaakov, le 9 août 2023
En ce beau mercredi, Annie et moi étions en route en route pour un mariage dans le nord, En chemin nous nous sommes arrêtés à Zichron Yaakov, un des villages les plus pittoresques d’Israël, pour prendre un café. En marchant du parking au centre-ville, nous sommes passés devant la synagogue Ohel Yaakov, appelée à juste titre « l’une des plus belles synagogues d’Israël ».
Quelques mots d’Histoire : Zichron Yaakov a été fondée en 1882 sur un terrain légalement acheté sous la loi Ottomane. Un peu plus tard, en 1886, une synagogue a été construite par le Baron de Rothschild qui lui a donné le nom de son défunt père. Zichron Yaakov n’est pas seulement un endroit agréable à visiter pour les touristes, et la synagogue Ohel Yaakov est bien plus qu’un splendide lieu de culte, ce sont des incarnations exemplaires de l’implémentation du rêve sioniste, de « l’espoir de deux mille ans d’être un peuple libre dans notre pays ».
Revenons maintenant aux événements de ce Mercredi 9 Aout :
Alors que nous approchions de la synagogue, nous avons vu une manifestation, une marche comme ils l’appelaient. C’était en effet difficile à manquer. De l’autre côté de la rue, en face de la synagogue se trouvaient environ 20 à 30 hommes, femmes et enfants, dont plusieurs portaient de puissants mégaphones. Ils agitaient des drapeaux israéliens. Bien en vue à l’avant de ce groupe, un autre grand drapeau, celui-ci aux couleurs de l’arc-en-ciel. Le bruit était assourdissant, les slogans impossibles à comprendre, le tumulte incessant.
Les manifestants semblaient ne pas vouloir rester en place : encore et encore, ils faisaient mine de vouloir traverser la rue et prendre d’assaut la synagogue. En fait, certains d’entre eux se sont avancés à plusieurs reprises au milieu de cette rue animée dans des postures belliqueuses.
Heureusement, un groupe de garde-frontières armés de fusils automatiques, montaient la garde devant la synagogue. Ils ont dû malgré tout se sentir menacés parce qu’un peu plus tard, un autre groupe de la même unité portant également des armes est arrivé en courant pour porter main forte à leurs collègues.
Un peu à l’écart, des familles religieuses dispersées, avec poussettes et jeunes enfants, les hommes pour la plupart portant les kippa tricotées des sionistes religieux, regardaient cette scène avec incrédulité. En effet, il était très difficile de donner un sens à ce qui se passait :
Des soldats juifs en armes protégeaient une synagogue contre d’autres Juifs qui voulaient apparemment y entrer par la force et avec une attitude hostile.
Nous ne pouvions pas en croire nos yeux, tout ceci allait bien au-delà de la haine gratuite (שנאת חינם), et montrait un mépris total pour tout ce qui était religieux, un déni complet de l’histoire juive et une négation du projet sioniste.
Qui étaient ces gens pleins de haine, si sûrs d’eux et pourtant si confus dans leur message ? Il était bien difficile de savoir ce qu’ils essayaient de transmettre. Comment ont-ils pu se planter sous le drapeau israélien et en même temps essayer de faire du mal à une synagogue, une synagogue historique et hautement symbolique de surcroit ?
Il est probable qu’au départ, cette « marche » était planifiée, organisée, et financée par le mouvement de protestation contre la réforme judiciaire. Mais une chose est sure, si c’était vraiment le cas, alors on peut dire avec certitude que cela n’était qu’un prétexte lointain. Le véritable message qui était véhiculé était une haine farouche, violente, bruyante contre tout ce qui touche de près ou de loin à la religion, notre religion, avec en sous-teinte, une hostilité totale vis-à-vis de la coalition en place et de notre premier ministre.
Le symbolisme était lourd et a surement laissé beaucoup de gens, nous y compris, avec un sentiment de malaise durable : comment des Juifs peuvent-ils se comporter ainsi, comment peuvent-ils se positionner dans des postures agressives devant un lieu de culte, à tel point que des soldats armés étaient nécessaires pour protéger cet édifice sacré ?
Il n’y a pas d’excuses. Aucune cause ne peut justifier ce comportement, Juifs contre Juifs, Juifs contre un lieu de culte juif.
Hébron, le 14 août 2023
En ce beau lundi, 5 jours seulement après le traumatisme de Zichron Yaakov, Annie et moi participions avec enthousiasme à la « Journée d’Hébron », un événement annuel magistralement coordonné par l’organisation « Israël Is Forever ». Cette journée était spécifiquement destinée aux Israéliens de longue date et aux nouveaux immigrants Francophones et aux Juifs de France contemplant la Aliyah. Plus d’un millier de personnes avaient fait le déplacement depuis la plupart des métropoles d’Israël pour y participer.
Il ne s’agissait pas de protester, mais de marcher ensemble, mais pas seulement. C’était aussi un événement éducatif ponctué de discours et de conférences par des représentants du gouvernement, des membres de la Knesset et d’autres, et animé par des historiens très enthousiastes et très compétents tels que Nili Kupfer et Haim Berkovitch, entre autres.
Plus d’un millier de participants ont marché pendant 45 minutes sous un soleil de plomb, dans des températures étouffantes, mais toujours dans la bonne humeur, dans les rues d’Hébron, portant de très nombreux drapeaux israéliens. Il y avait des mégaphones bien sûr, comment s’adresser autrement à une foule aussi nombreuse ? Mais pas de cris, pas de colère, pas d’agressivité. Juste un immense sentiment de fierté d’être entourés de nos sœurs et frères Juifs, célébrant ensemble notre histoire, notre patrimoine, notre culture.
Nous avons visité une maison d’étude et de culte, la Yeshiva Shavei Hebron. Contrairement aux manifestants de Zichron Yaakov, nous ne nous sommes pas montrés belliqueux, nous n’avons pas essayé de prendre d’assaut ce lieu sacré. Nous y sommes entrés avec tout le respect dû à une telle institution. Et bien sûr nous nous somme comportés de même lors la visite au Tombeau des Patriarches un peu plus tard dans la journée.
Tout au long de la journée, les organisateurs n’ont pas cessé de communiquer le but de cet évènement, ils l’ont fait clairement et efficacement : nous étions tous là pour affirmer notre attachement à Hébron en tant que lieu de sépulture de nos patriarches, un lieu qui appartient au peuple juif depuis des milliers d’années et qui a continuellement abrité une présence juive depuis cette époque. Nous étions là aussi, par extension, pour affirmer notre attachement à de nombreux autres lieux saints, villages et territoires juifs. Nous étions enfin là pour montrer notre soutien aux individus, aux familles, et aux institutions qui maintiennent et renforcent la présence juive à Hébron, à Kyriat Arba et dans de nombreuses communautés similaires en Judée-Samarie.
Il y avait aussi une force de police et de garde-frontières clairement visible tout au long de la journée. Rappelons-nous qu’à Zichron Yaakov, ils étaient là pour protéger les Juifs et les lieux sacrés juifs contre la menace d’autres Juifs. Ce faisant, ils étaient les récipiendaires de nombreux abus verbaux. La situation à Hébron tout au long de cette journée était radicalement différente. Les forces armées étaient présentes à Hébron pour empêcher les actes terroristes potentiels qui auraient pu être commis par des Arabes. En fait, cela faisait très chaud au cœur de voir tout au long de la journée, mais surtout à la fin de l’événement, de très nombreux participants venir spontanément remercier la police et les garde-frontières pour leur dévouement, leur protection et leur gentillesse.
Cinq jours : si proches et si lointains !
J’aurais aimé pouvoir dire que les événements du « Jour d’Hébron » m’ont fait oublier le sentiment négatif qui me hantait après cette journée à Zichron Yaakov. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Je ne suis pas près d’oublier la haine dont j’ai été témoin ce jour-là. Je ne suis pas près de comprendre comment certains Juifs peuvent faire preuve d’autant d’hostilité pour tout ce qui est religieux. Je ne suis pas prêt à accepter le rejet du sionisme et de notre rêve de deux mille ans.
À peine cinq jours plus tard, j’ai adoré être à Hébron avec un millier de personnes aux pensées similaires, aux valeurs quasi-identiques et aux cultures complémentaires et compatibles. J’ai réalisé ce jour-là que le projet sioniste est bien vivant en nous et avec l’aide de D.ieu sera encore plus vivant dans la vie de nos enfants.
J’espère et je prie pour que nous puissions un jour bientôt trouver le terrain d’entente qui permettra à tous les Juifs (y compris les marcheurs de Zichron Yaakov et les marcheurs d’Hébron, avançant main dans la main) de vivre dans la paix, l’amitié, le respect mutuel et la prospérité commune sur la terre d’Israël, en tant que nation juive unie et indivisible avec le parapluie de notre patrimoine commun, de notre histoire, de nos traditions, et de nos croyances pour protection éternelle.
