L'antisémitisme s'est enraciné dans la classe moyenne britannique et ses institutions, du service national de santé aux universités en passant par le secteur culturel. C'est l'inquiétante conclusion d'un nouveau rapport gouvernemental qui documente la progression de cette discrimination et l'échec des institutions à l'endiguer.

Une discrimination devenue "normale"

Rédigé par Lord Mann, conseiller gouvernemental en matière d'antisémitisme, et Penny Mordaunt, ancienne secrétaire à la Défense, ce rapport commandé par le Conseil des députés des Juifs britanniques dresse un tableau sombre. Les Juifs britanniques subissent désormais des préjugés croissants "dans nos professions, notre vie culturelle et les services publics", se sentant "victimes de souffrances et méprisés".

"Ce qui nous a vraiment effrayé, c'est la normalisation croissante d'influences beaucoup plus extrêmes, personnelles et parfois transformatrices, dirigées contre des personnes simplement parce qu'elles sont juives", soulignent les auteurs. Ces deux responsables politiques non juifs et de bords opposés concluent unanimement : "Si notre communauté juive est confrontée à la discrimination, c'est un échec de notre société."

Le NHS particulièrement touché

Le service national de santé présente des dysfonctionnements préoccupants. De nombreux employés juifs du NHS estiment que leurs problèmes professionnels sont "ignorés" et "balayés sous le tapis". Selon le General Medical Council, les médecins juifs signalent une recrudescence du harcèlement antisémite de la part de leurs collègues depuis le 7 octobre, allant du harcèlement au travail aux publications sur les réseaux sociaux célébrant les attentats.

Les universités ne sont pas épargnées. L'antisémitisme sur les campus a explosé depuis octobre 2023, avec un nombre record d'insultes, de menaces et d'agressions contre des étudiants et membres du personnel juifs durant l'année universitaire 2023-2024.

Des réponses institutionnelles défaillantes

Le rapport pointe également les lacunes policières dans la gestion des crimes haineux antijuifs, notamment lors des manifestations pro-palestiniennes. Les forces de l'ordre peinent à développer "une norme et une compréhension cohérentes de l'antisémitisme" sur l'ensemble du territoire.

Les Juifs britanniques sont souvent "tenus responsables des actions du gouvernement israélien", devenant la cible de manifestations pro-palestiniennes. Cette responsabilisation collective alimente une spirale discriminatoire que les institutions semblent incapables de briser.

Dix recommandations pour agir

Le rapport, qui sera publié mardi et examiné par le gouvernement, formule dix recommandations. Parmi elles figurent la reconnaissance du judaïsme comme identité ethnique, la mise à jour du niveau de surveillance des crimes antisémites et le lancement d'un "certificat de formation à l'antisémitisme" pour les employeurs.

Ces mesures interviennent alors que les incidents antisémites ont atteint des sommets historiques selon le Community Safety Trust, qui recense les signalements en Grande-Bretagne. Un réveil urgent face à une discrimination qui gangrène désormais le cœur de la société britannique