Pour atteindre cet objectif, l’Allemagne se tourne vers Israël. Ces dernières années, elle a signé des accords historiques avec Jérusalem : acquisition du système antimissile Arrow-3 pour près de 4 milliards d’euros, achat de drones Heron TP, intégration du système de protection actif Trophy sur ses chars Leopard et adoption du réseau de communication E-LynX. Israël est ainsi devenu un fournisseur clé du réarmement allemand.
Ce virage militaire s’explique par plusieurs raisons. La guerre en Ukraine et la menace russe ont convaincu Berlin que sa sécurité dépend d’une armée crédible et moderne. Après des décennies de sous-investissement, la Bundeswehr s’était affaiblie au point de ne plus remplir pleinement ses missions. Le gouvernement de Friedrich Merz veut donc combler ce retard et répondre aux attentes des alliés, notamment des États-Unis, qui exigent une contribution plus forte de l’Allemagne à la défense européenne. Au-delà, Berlin affiche l’ambition de redevenir une puissance stratégique à part entière, capable de peser face aux menaces globales, qu’il s’agisse de la Chine, du terrorisme, des cyberattaques ou des tensions persistantes au Moyen-Orient.
Mais dans le même temps, l’Allemagne affiche une position restrictive vis-à-vis d’Israël. Le chancelier a annoncé le 8 août la suspension des exportations d’armes allemandes dès lors qu’elles pourraient être utilisées dans la bande de Gaza, officiellement pour « prévenir un usage humanitaire problématique ». Ce paradoxe est frappant : l’Allemagne se renforce grâce aux technologies israéliennes tout en limitant l’accès d’Israël à une partie de l’armement allemand. Un double discours qui interroge sur la cohérence de la politique de défense allemande : alliée stratégique et cliente privilégiée d’Israël, mais aussi puissance normative dès que le conflit touche Gaza.