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Des documents d'archives prouvent la complicité de l'Amérique du Sud dans la fuite de Mengele

La déclassification lundi d'archives du renseignement argentin livre des éléments sur l'un des épisodes les plus troublants de l'après-guerre : la vie tranquille menée par Josef Mengele, le médecin tortionnaire d'Auschwitz, sur le territoire argentin pendant près d'une décennie.

3 minutes
1 décembre 2025

ParGuitel Benishay

Des documents d'archives prouvent la complicité de l'Amérique du Sud dans la fuite de Mengele
Photo: Jackdawson1970 https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/

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La déclassification de documents d'archives inédits prouvent la complicité de l'Argentine et d'autres pays d'Amérique du Sud dans la fuite de celui qui était surnommé ''l'ange de la mort'' d'Auschwitz.

Les documents révèlent que le criminel nazi est arrivé en Argentine en 1949 avec un faux passeport italien au nom de Gregor Helmuth, et qu'il a même obtenu des papiers d'identité officiels sous ce nom. Plus troublant encore : dès le milieu des années 1950, les services argentins connaissaient sa véritable identité sans jamais intervenir.

Les archives dévoilent l'existence d'un réseau de protection étendu, mobilisant la diaspora allemande locale et des complices jusqu'au Brésil. Photographies, fichiers d'immigration, rapports de filature et échanges entre agences de renseignement estampillés "top secret" témoignent d'une surveillance... sans conséquence. Les autorités argentines documentaient méticuleusement ses déplacements, ses rencontres et ses activités commerciales, sans jamais passer à l'action.

Parmi les pièces les plus accablantes figure un article de presse archivé dans les dossiers officiels : l'interview de José Formanski, rescapé d'Auschwitz établi en Argentine, qui affirmait avoir reconnu et croisé Mengele. "Je l'ai parfaitement identifié. Je l'avais vu dans le camp en uniforme SS", déclarait-il, évoquant les expérimentations monstrueuses subies par lui-même et son frère jumeau. La présence de ce témoignage dans les archives gouvernementales constitue une preuve accablante de l'inaction délibérée des pouvoirs publics.

Lorsque l'Allemagne réclame formellement son extradition en 1959, un magistrat argentin balaie la demande en invoquant une supposée "persécution politique". Les archives mettent également en évidence un cloisonnement dysfonctionnel entre services de renseignement, chacun détenant des informations capitales sans jamais les mutualiser, paralysant ainsi toute perspective d'arrestation.

Fort de cette impunité, Mengele finit par abandonner toute précaution : il régularise son identité sous son véritable nom, se remarie, dirige des entreprises et jouit d'appuis familiaux et financiers solides.

Face à la montée des pressions internationales, il gagne le Paraguay en 1959 où il obtient la nationalité, avant de trouver refuge au Brésil. Protégé par des fermiers allemands nostalgiques du IIIe Reich dans la région de São Paulo, il multiplie les pseudonymes tout au long des années 1960 et 1970.

Josef Mengele est mort en 1979 des suites d'un AVC survenu lors d'une baignade sur la côte brésilienne après avoir vécu libre pendant plus de 30 ans malgré les crimes monstrueux qu'il a commis. Inhumé sous le nom de Wolfgang Gerhard, son identité réelle n'est confirmée qu'en 1985 lors de l'exhumation de sa dépouille, authentification ultérieurement validée par des analyses génétiques dans les années 1990.