Quatre journalistes du magazine satirique turc LeMan ont été arrêtés cette semaine sous l’accusation de « profanation des valeurs religieuses », après la publication d’une caricature destinée à dénoncer les actions militaires d’Israël à Gaza. L’illustration, perçue par les autorités et une partie de la population comme une représentation cynique du prophète Mahomet a déclenché une vive controverse. Le magazine turc a été comparé à Charlie Hebdo ce qui suscite une vive inquiétude auprès de ses contributeurs et dirigeants.
Le ministre turc de l’Intérieur, Ali Yerlikaya, a qualifié la caricature de « répugnante » et publié une vidéo montrant l’arrestation des suspects. Des mandats d’arrêt supplémentaires auraient été émis contre d’autres responsables du journal.
La caricature en question, également relayée sur les réseaux sociaux, montre deux figures ailées planant au-dessus d’une ville bombardée. L’une dit : « Salam Aleikoum, je suis Mohammed », l’autre répond : « Salam Aleikoum, je suis Moïse. »
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Selon LeMan, l’intention était de dénoncer les ''violences israéliennes'' à Gaza par une mise en scène céleste de coexistence interreligieuse, soulignant le contraste entre l’harmonie spirituelle et les conflits humains. Mais les autorités ont vu dans cette représentation une atteinte inacceptable au prophète de l’islam.
Le ministre de la Justice, Yılmaz Tunç, a annoncé l’ouverture d’une enquête pour « atteinte publique aux valeurs religieuses ». Sur X, il a déclaré : « Une telle caricature ou représentation de notre prophète ne fait pas qu’offenser nos valeurs religieuses — elle menace aussi la paix sociale. Des mesures judiciaires immédiates seront prises. »
À la suite de la publication, des centaines de manifestants se sont rassemblés devant les bureaux du magazine à Istanbul. D’importantes forces de police, dont des unités antiémeutes, ont été déployées. Des témoins ont rapporté l’usage de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes pour disperser la foule, qui scandait des slogans tels que : « Œil pour œil, sang pour sang, vengeance ! »
De son côté, le rédacteur en chef de LeMan, Tuncay Akgün — actuellement basé à Paris — a déclaré à l’AFP que la caricature avait été mal interprétée et assuré que le magazine « ne prendrait jamais un tel risque délibérément ». Il a jugé les comparaisons avec l’affaire Charlie Hebdo de 2015 « intentionnelles et profondément inquiétantes. »