Quoi qu'il en soit, les tensions entre l'échelon politique et les représentants de l'armée sont palpables à chaque réunion du cabinet.
Ces derniers acceptent difficilement que les ministres, dont ils doivent pourtant appliquer la politique, leur posent des questions critiques et les mettent en difficulté sur certains sujets, ce qui entraine des débats très animés.
A chaque fois, le ministre de la Défense et les ministres du parti de Benny Gantz volent au secours des militaires en leur apportant un soutien total et en face certains ministres du Likoud et des partis sionistes religieux insistent pour avoir des réponses de l'armée. L'essentiel des cris sont ceux des ministres entre eux, d'ailleurs.
Hier soir, le sujet litigieux était l'annonce faite dans la presse un peu plus tôt de la décision du Chef d'Etat-major, Herzi Halévy de nommer une commission d'enquête interne à l'armée pour examiner les défaillances du 7 octobre. Les ministres qui l'ont critiqué lui reprochaient plusieurs points:
- La décision de mettre en place cette commission a été prise par la hiérarchie militaire sans en référer à l'échelon politique
- Comment l'armée peut-elle être à la fois juge et partie en nommant elle-même une commission pour enquêter sur ses défaillances?
- La mise en place d'une commission d'enquête en pleine guerre risque de détourner l'attention des responsables de la guerre de la gestion de la guerre pour se préoccuper des résultats de cette commission. Les ministres s'interrogent donc sur le moment choisi.
- Les membres de la commission, nommés par Herzi Halévy, sont des anciens cadres de l'Etat-major et des renseignements, qui ont des prises de position politiques très tranchées. Ainsi, parmi eux se trouve Shaoul Mofaz, l'ancien Chef d'Etat-major et ministre de la Défense au moment du retrait de Gaza. A cette époque il avait garanti qu'après ce retrait, la Bande de Gaza ne deviendrait pas un Hamastan, pour lui le retrait unilatéral apporterait la sécurité à Israël. Par ailleurs, il y a quelques semaines à peine, il déclarait qu'il fallait libérer tous les terroristes emprisonnés en Israël pour récupérer les otages. Des idées qui interrogent sur la neutralité des conclusions auxquelles il pourrait arriver dans le cadre d'une enquête sur le 7 octobre.
A part Mofaz, Halévy a aussi nommé Aharon Zeevi Farkash pour faire partie de cette commission. Zeevi Farkash était chef du renseignement militaire au moment du retrait de Gaza. Il avait, lui aussi, assuré que la sécurité d'Israël en serait renforcée. Récemment, au moment de la protestation contre la réforme judiciaire, il a apporté son total soutien aux réservistes qui avaient décidé de ne plus servir en raison de la politique du gouvernement.
Les ministres sont donc perplexes quant à la composition de la commission qui devra juger des défaillances du 7 octobre, lorsque les principaux membres ont participé à la ''conception'' qui a conduit à ce drame et se placent ouvertement d'un côté bien précis de l'échiquier politique.
Finalement, le Chef d'Etat-major a assuré que cette commission ne servait qu'à étudier les manquements opérationnels afin de bénéficier des conclusions pour la gestion de la guerre actuelle.
Si tel est le cas, les ministres s'accordent à dire que les conclusions opérationnelles sont du domaine réservé de l'armée. Ils demandent que la commission ne s'occupe pas des questions de conceptions stratégiques qui ont amené à la catastrophe du 7 octobre, sujet qui nécessite impérativement une implication de l'échelon politique et qui ne peut être traité par l'armée seule et encore moins en étant juge et partie.