Entretien avec la psychologue Annie Darmon, qui livre quelques conseils aux parents afin que l'angoisse et le stress vécus durant les bombardements iraniens ne s'installent pas dans la durée chez leurs enfants.
Actualité Juive : Avez-vous été amenée à aider des enfants particulièrement impactés sur le plan psychologique par les bombardements iraniens ?
Annie Darmon : Oui. Des enfants qui étaient tout à fait équilibrés avant cette période ont été comme pétrifiés, incapables de fonctionner normalement. Ils avaient peur de descendre aux abris, d’aller aux toilettes seuls, de dormir seuls – ils se sont mis à avoir peur de tout. Une mère m’a par exemple contactée au sujet de son fils : les bombardements iraniens étant venus s’ajouter au fait que le père était en milouïm, cet enfant s’est mis à avoir un comportement régressif.
Comment faire pour que les angoisses liées aux bombardements ne s’installent pas dans la durée chez ces enfants ?
Les enfants israéliens sont malheureusement habitués aux alertes, cela fait partie de leur vie. Mais si l’on sent qu’un enfant a été particulièrement impacté, au point qu’il se comporte différemment et qu’il ne parvient plus à fonctionner de manière habituelle, il ne faut pas attendre pour se tourner vers un spécialiste ou toute autre personne adéquate afin de lui permettre d’évacuer ses angoisses. Le second aspect important est que les parents et l’entourage doivent s’efforcer d’inscrire ces événements difficiles dans un contexte délimité : il faut insister sur leur ponctualité, afin de replacer l’enfant dans une continuité temporelle, et mettre l’accent sur l’avenir, sur « l’après ». La troisième chose importante est de revenir aussi vite que possible à une routine dont l’enfant a impérativement besoin pour son équilibre. Enfin, il est essentiel de dédramatiser la situati n auprès des enfants en leur expliquant que les alertes ne sont, en elles-mêmes, pas dangereuses, mais au contraire destinées à nous indiquer ce que nous devons faire pour nous mettre à l’abri du danger.
Quels sont les signes qui doivent alerter les parents sur d’éventuels dommages dans la durée ?
Un enfant qui ne parle pas comme avant ou qui pleure anormalement sont des comportements qui doivent alerter, tout comme un enfant qui pose en boucle des questions qui montrent qu’il est obsédé par une idée fixe – par exemple : est-ce qu’on pourrait nous tuer ? Y a-t-il des terroristes ? Les bombardements vont-ils reprendre ? Les enfants qui se remettent à faire pipi au lit, qui ne veulent plus dormir seuls ou qui mangent moins bien doivent également bénéficier d’une attention particulière. Il faut souligner que le syndrome de stress post-traumatique est quelque chose de bien particulier et qu’il est nettement moins fréquent chez l’enfant que chez l’adulte. Pour qu’un enfant en soit atteint, il faut vraiment qu’il ait vécu un événement traumatique comme un bombardement direct sur sa maison ou le décès d’un proche.
Article paru dans ActuJ (numéro 1788)