Sécurité

Jérusalem-Est : la voiture du cheikh Wadi al-Jaabari incendiée

Sans doute ciblé après avoir proposé un « Émirat d’Hébron » et la paix avec Israël

3 minutes
9 juillet 2025

ParNathalie Sosna Ofir

Jérusalem-Est : la voiture du cheikh Wadi al-Jaabari incendiée
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La voiture du cheikh Wadi al-Jaabari, figure religieuse influente d’Hébron, a été incendiée dans la nuit de lundi à mardi dans le quartier d’Issawiya, à Jérusalem-Est. L’attaque, menée par de jeunes Palestiniens, semble directement liée à ses prises de position controversées en faveur d’une reconnaissance mutuelle entre Israël et une entité autonome palestinienne.

Surnommé « Abu Sanad », al-Jaabari s’est récemment fait connaître au sein et au-delà des Territoires palestiniens pour une initiative audacieuse : avec quatre autres cheikhs issus de grandes familles d’Hébron, il a proposé la création d’un « Émirat autonome », sorte d'alternative à l’Autorité palestinienne. Dans une lettre adressée le 5 juillet au Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu et au ministre de l’Économie Nir Barkat, les signataires appellent à une rupture avec le statu quo issu des accords d’Oslo de 1993, qu’ils qualifient de « désastreux ».

Un projet radical et inédit

Ce « plan de paix local » repose sur plusieurs points concrets : reconnaissance d’Israël comme État-nation du peuple juif, engagement total contre le terrorisme, demande de permis de travail pour des milliers d’ouvriers palestiniens, et création d’une vaste zone industrielle de 400 hectares près de la barrière de sécurité.

Les cheikhs plaident pour une approche pragmatique : « Nous voulons redonner de l’emploi, rétablir la sécurité et offrir un avenir à notre jeunesse. » L’initiative s’inscrit dans la dynamique régionale des accords d’Abraham, signés en 2020 entre Israël et plusieurs pays arabes, et ambitionne d’y intégrer Hébron, ville au tissu tribal complexe et historiquement marquée par les tensions.

Rejet de l’Autorité palestinienne

Le projet a provoqué une onde de choc à Ramallah. L’Autorité palestinienne dénonce une « manœuvre de division » orchestrée pour saper la cause nationale. Selon elle, seul un accord global et multilatéral peut garantir les droits du peuple palestinien. Les partisans du cheikh, eux, accusent l’AP de faillite politique et économique.

Sur le terrain, la population est divisée. À Hébron, ville fragmentée entre zones contrôlées par Israël et l’AP, certains habitants disent préférer un emploi à une idéologie : « On ne veut plus militer, on veut travailler », confie un commerçant. D’autres craignent de voir émerger un micro-État dépendant du bon vouloir israélien, sans véritable souveraineté.

Un précédent pour d’autres villes ?

Si Jérusalem venait à accepter l’offre des cheikhs, le modèle pourrait inspirer d’autres bastions palestiniens aux structures tribales solides, comme Naplouse ou Jénine. Pour Israël, l’initiative pourrait représenter une opportunité stratégique : affaiblir l’AP tout en favorisant des partenaires locaux plus favorables à la normalisation.