Dix mois après la chute du régime de Bachar el-Assad, la Syrie tient ses premières élections parlementaires. Un tournant politique majeur pour Damas scruté par Jérusalem, mais un exercice semé d’obstacles : le gouvernement de transition ne contrôle pas l’ensemble du territoire, rendant impossible tout vote dans certaines zones, notamment dans la région druze de Soueïda et dans les zones kurdes de l’est du pays.
À Damas, des « collèges électoraux » ont été installés pour désigner les membres du Conseil du peuple, le futur Parlement chargé de légiférer pendant la période de transition. Il ne s’agit pas d’un vote direct : selon la BBC, deux tiers des 210 sièges seront attribués par ces collèges, tandis que le reste sera nommé par le président intérimaire Ahmad al-Charaa.
Les autorités ont confirmé que le scrutin se déroulera dans 50 des 60 districts syriens, laissant vacants les sièges de Raqqa, Hassaké et Soueïda jusqu’à nouvel ordre. Les bureaux de vote ont ouvert à 9 heures, et les bulletins seront dépouillés publiquement en présence des médias, a indiqué l’agence officielle SANA.
Selon le ministère de l’Intérieur, 1 578 candidats se présentent, dont 14 % de femmes. Les campagnes n’ont duré que quelques jours, un laps de temps jugé trop court pour que les électeurs puissent connaître réellement les programmes.
Parmi les figures mises en avant par les médias officiels figure une surprise : le rabbin syro-américain Henry Hamra, premier candidat juif depuis 1967. Il se présente à Damas avec un programme axé sur la reconstruction, le développement économique et la levée des sanctions du Caesar Act. Il a déclaré vouloir « œuvrer pour une Syrie unie et tolérante » et renforcer les liens avec la diaspora syrienne aux États-Unis.
Sur le terrain, la situation reste tendue. Les Forces démocratiques syriennes -FDS- soutenues par Washington et actives dans l’est du pays, refusent encore leur intégration dans la nouvelle armée syrienne. Résultat : aucune élection n’a lieu dans les zones qu’elles contrôlent, pas plus que dans la ville de Tel Abyad, occupée par la Turquie.
Le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, a salué le processus électoral tout en appelant à exclure le PYD, principale formation kurde de Syrie, qu’Ankara considère comme liée au PKK, classé terroriste.
Le porte-parole du ministère syrien de l’Intérieur, Noureddine Baba, a qualifié ces élections de « plus importantes en soixante ans ». Après un demi-siècle de dictature et une décennie de guerre civile, le pays tente de renouer avec une vie politique.,Un centre opérationnel national a été mis en place pour superviser le scrutin, placé sous haute sécurité.
Mais au-delà des urnes, un défi majeur demeure : la légitimité d’un processus électoral basé sur le recensement de 2010, dans un pays où des millions de personnes ont fui ou été déplacées.,La Syrie vote donc aujourd’hui, mais pas toute le pays.