À 48 ans, la professeure Yifat Merbl, du département d'immunologie systémique de l'Institut Weizmann des Sciences, a été sélectionnée par la prestigieuse revue Nature parmi les dix personnalités qui ont façonné la science en 2025. Une reconnaissance qui intervient dans un contexte particulièrement éprouvant : six mois plus tôt, son laboratoire était entièrement détruit par un missile iranien qui a frappé l'institut le 15 juin 2025.
Une découverte révolutionnaire dans les "poubelles" cellulaires
La découverte qui a propulsé Yifat Merbl sur le devant de la scène concerne un mécanisme immunitaire caché dans le processus de dégradation des protéines. En étudiant les protéasomes, ces structures cellulaires qui recyclent les protéines, elle a révélé que certains fragments libérés lors de ce processus peuvent combattre directement les bactéries.
Nature a qualifié Yifat Merbl de "détective des peptides" pour avoir dévoilé cette activité antimicrobienne dissimulée au sein de protéines que les cellules dégradent normalement. Cette découverte ouvre des perspectives prometteuses pour le développement d'antibiotiques et de nouvelles approches thérapeutiques contre le cancer, à une époque où la résistance aux antibiotiques constitue une menace croissante.
Un parcours atypique marqué par l'exclusion
Pourtant, le chemin de Yifat Merbl vers l'excellence scientifique est loin d'être conventionnel, comme le rapporte la chaîne N12. Si son bureau est aujourd'hui orné de nombreux diplômes, elle n'a jamais obtenu de baccalauréat. Durant son adolescence, le système éducatif israélien n'a pas su l'intégrer : en seconde, on lui a dit qu'elle n'était pas faite pour le cursus académique, et en première, il a été décidé de ne pas la présenter aux examens du baccalauréat, y compris en chimie, un domaine dans lequel elle excelle aujourd'hui.
Elle a quitté l'école avec un profond sentiment d'échec et a enchaîné pendant des années les petits boulots. "On me considérait comme un potentiel gâché", confie-t-elle. Le tournant est survenu lorsqu'elle a obtenu un score exceptionnel de 752 au test psychométrique israélien.
A alors débuté un parcours universitaire impressionnant : des études de biologie computationnelle à l'université Bar-Ilan, suivies d'un doctorat en biologie des systèmes à la prestigieuse Harvard Medical School en 2011. Malgré sa réussite académique, un sentiment d'exclusion et la peur de l'échec l'ont accompagnée tout au long de son parcours.
Ce n'est qu'à 43 ans que Yifat Merbl a découvert qu'elle souffrait de trouble du déficit de l'attention avec hyperactivité (TDAH). "Si j'avais été diagnostiquée plus tôt, je me serais épargné bien des souffrances", témoigne-t-elle. Elle réalise aujourd'hui que sa vision différente de la réalité lui a peut-être permis de trouver des solutions scientifiques là où d'autres n'avaient pas cherché.
Reconstruire dans les décombres
L'année 2025 a été marquée par des défis considérables. Le 15 juin, deux missiles iraniens ont frappé l'Institut Weizmann, détruisant entièrement son laboratoire dans le bâtiment Wolfson. Environ 45 laboratoires ont été endommagés ou détruits lors de cette attaque, causant des dégâts estimés à 570 millions de dollars.
Mais Yifat Merbl n'a pas baissé les bras. Chaussée de tongs, elle s'est précipitée dans le bâtiment en ruines pour tenter de sauver ce qui pouvait l'être, notamment en fermant les portes des congélateurs contenant des échantillons scientifiques irréplacables. Grâce au soutien de l'Institut Weizmann, qui a aidé à relocaliser une cinquantaine de laboratoires endommagés, son équipe est maintenant opérationnelle dans un laboratoire de biologie végétale voisin, avec du matériel récupéré et nouvellement acheté.
Au-delà des destructions matérielles, la scientifique doit également faire face au boycott universitaire d'Israël. Elle relate des cas où des chercheurs israéliens ont été exclus de financements de recherche et où des invitations à des conférences ont été conditionnées à des approbations ultérieures. Malgré cela, en tant que sioniste et ancienne officière de l'armée de l'air israélienne, elle reste déterminée à poursuivre ses activités dans le pays. "La question n'est pas de savoir si nous restons ici, mais comment nous continuons à réussir", affirme-t-elle.
Depuis la publication de sa sélection par Nature, Yifat Merbl a reçu de nombreux témoignages émouvants de parents la remerciant pour l'espoir qu'elle a insufflé à leurs enfants confrontés à des difficultés similaires dans le système éducatif. "On peut ne pas réussir, mais il est essentiel d'essayer", souligne-t-elle, encourageant la jeune génération à cultiver sa curiosité et sa passion.
Lorsqu'on lui demande ce qu'elle dirait à Yifat Merbl, 16 ans, celle qui avait été expulsée de l'école, elle répond simplement : "Bravo, je suis fière de toi."
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