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La journaliste Anne Sinclair était l'invitée d'un congrès du mouvement J-Call, dans les locaux du Parlement européen.
Elle y a prononcé un discours qui s'est avéré une véritable diatribe contre le gouvernement israélien et son projet de réforme judiciaire.
''Je suis française, je suis juive, j'ai l'âge de l'Etat d'Israël à deux mois près et ce qui s'y passe depuis trois mois me bouleverse''. C'est par ces mots qu'Anne Sinclair a commencé ses propos.
"Il y a chez les Juifs de Diaspora, cette double fierté d'appartenir pleinement au pays où ils sont nés et d'éprouver de l'orgueil devant ce qu'a accompli Israël en 75 ans''.
La journaliste décrit la fierté qu'elle ressent face aux succès israéliens et à sa démocratie. Et elle ajoute: ''Les Juifs de Diaspora ont le droit de dire leur inquiétude quand la démocratie est menacée au nom même du judaïsme''. Elle balaie l'argument selon lequel, les Juifs de Diaspora n'ont pas leur mot à dire tant qu'ils ne vivent pas en Israël. Pour elle, ''nous aurions donc le droit de parler et d'écrire sur Trump et ses turpitudes mais pas sur Netanyahou et ses scandales, sur les discours liberticides d'Erdogan mais pas sur les propos terrifiants de Smotrich? Si nous ne disons rien, nous sommes complices du danger qui pèse sur Israël et c'est pourquoi nous devons parler''.
Elle poursuit: ''Depuis bientôt trois mois, j'ai honte et j'ai peur. J'ai honte de voir le chef du gouvernement israélien prêt à tout pour échapper aux poursuites qui l'atteignent depuis si longtemps, y compris pour cela à piétiner le conflit d'intérêt auquel il est soumis. Bref, à s'affranchir des règles élementaires de la démocratie. C'est un crime que le gouvernement veuille non pas réformer mais faire taire la Cour suprême''. Anne Sinclair dit aussi sa honte des actions de représailles contre le village de Hawara, qualifié de ''pogrom''.
''J'ai honte que le ministre des Finances d'un Etat démocratique ait pu appeler à raser un village arabe. Et comment ce même ministre a pu oser dire à Paris, il y a quelques jours, que le peuple palestinien n'existait pas? Comment?''.
Anne Sinclair reprend aussi à son compte les arguments de l'opposition israélienne qui prétend que les femmes et les LGBT seront bientôt des minorités persécutées en Israël: ''J'ai honte comme femme et comme personne. Je me suis souvent insurgée contre les pays où règne un Islam fanatique, conduit par des Mollahs bornés qui soumettent les femmes à des lois rétrogrades ou qui poursuivent les personnes LGBT. Je suis indignée de voir dans le gouvernement d'Israël, des hommes pétris d'un judaïsme d'antiquité qui voudraient renvoyer les femmes à la maison, qui tiennent des propos homophobes et dégradants ou qui freinent les mesures obligeant les hommes violents à porter un bracelet électronique".
Sinclair fait part de sa peur pour la sécurité d'Israël face aux menaces des réservistes de refuser de se présenter.
''J'ai peur d'un gouvernement pieds et poings liés aux nationalistes les plus religieux qui veulent transformer le judaïsme et cela nous concerne, nous aussi, ô combien, en une acception purement religieuse et radicale.
Israël est face à la menace la pire qui soit: perdre le sens de sa raison d'être et passer du statut de seule démocratie libérale de la région à une théocratie illibérale''.
Anne Sinclair estime qu'il n'est pas rare de voir des gouvernements élus démocratiquement élargir leurs pouvoirs pour changer de régime.
"Si demain un gouvernement décidait de supprimer le droit de vote des Arabes israéliens, de voter des lois contre les personnes LGBT, de limiter le droit de grève ou de supprimer la liberté de la presse pour les journaux anti-gouvernementaux, qui pourrait s'y opposer sinon la Cour suprême?''.
Elle se dit très fière des manifestations en Israël contre la réforme, reprenant les chiffres controversés de 500000 manifestants dans tout le pays et félicite même l'utilisation des costumes de la ''servante écarlate'' pour dénoncer le danger qui pèse, selon elle, sur les femmes.
Elle termine en citant Pierre Mendès-France qui disait que la démocratie était d'abord ''un code moral''.