Veille de Pessah 2024, à Gan Yavné: Nir Doron Avraham, 34 ans, père de trois enfants et réserviste de la brigade Givati, se donne la mort après cinq mois à Gaza et une blessure à l’oreille qui l’avait rendu hypersensible au bruit. Sa veuve, Nofar, décrit un retour impossible à la normale, fait de silences, d’absences et d’un regard éteint. Son drame illustre un phénomène que les chiffres confirment: 21 suicides en 2024, dont une majorité de réservistes – plus qu’aucune année depuis 2011.
D’autres cas ont marqué l’opinion sans que l’on puisse tous les détailler ici: Eliran Mizrahi, 40 ans, finalement reconnu « tombé » après un long bras de fer administratif; Vladislav Sergienko, rappelé des mois durant; ou encore de jeunes commandants démobilisés puis rattrapés par l’ESPT. Pour le Pr Yossi Levi-Belz (Centre d’étude du suicide, Ruppin), le risque augmente paradoxalement à mesure que la société « revient à la routine » tandis que les réservistes restent pris dans le trauma. Dr Shiri Daniels (ERAN) pointe la cassure entre les réflexes de guerre et la vie familiale. Tsahal affirme avoir renforcé le dispositif (centaines d’officiers de santé mentale, env. 800 thérapeutes, hotline) et dit avoir remis 85 % des suivis au combat; les familles jugent ces efforts encore insuffisants au moment critique du retour à la maison.
L’enjeu n’est plus de multiplier les portes d’entrée, mais de les relier. Il faut un protocole sans couture et sans paperasse: transmission automatique des dossiers de Tsahal vers le ministère de la Santé et les caisses dès J+0; rendez-vous prioritaire sous sept jours; appels proactifs à J+7/J+30; lignes directes pour les proches; congés et protections d’emploi adaptés aux réservistes en détresse. Sans ce suivi intégré, trop d’alertes se perdent dans l’administration – et le prix se paie en vies.