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Cinq ans après : tournant dans l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth

L'enquête a souffert de multiples entraves

3 minutes
16 septembre 2025

ParJohanna Afriat

Cinq ans après : tournant dans l'enquête sur l'explosion du port de Beyrouth
Le port de Beyrouth dévasté après l'explosion du 4 août 2020 Photo : iStock

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Les autorités bulgares ont procédé mardi à l'arrestation d'Igor Grachushkin, 48 ans, propriétaire du cargo "Rhosus" qui avait acheminé vers le port de Beyrouth les 2 750 tonnes de nitrate d'ammonium à l'origine de l'explosion dévastatrice du 4 août 2020.

L'interpellation s'est déroulée le 5 septembre à l'aéroport de Sofia lors d'un contrôle de routine des passagers en provenance de Paphos (Chypre). Selon les forces de l'ordre locales, Grachushkin n'a opposé aucune résistance et a pleinement coopéré après avoir demandé l'assistance d'un avocat. Il a déclaré se trouver en Bulgarie à des fins touristiques.

Cette arrestation fait suite à une notice rouge d'Interpol émise en 2021 à la demande des autorités libanaises. Le propriétaire du navire est soupçonné d'implication dans l'importation d'explosifs au Liban et dans un acte terroriste ayant causé de nombreux décès.

Le "Rhosus", battant pavillon moldave, avait quitté la Géorgie en 2013 à destination du Mozambique. Confronté à des difficultés techniques, il avait été contraint de faire escale à Beyrouth. Suite à une plainte d'une société locale, le navire avait confisqué et sa dangereuse cargaison transférée dans un entrepôt abandonné du port.

Malgré de nombreux avertissements des autorités compétentes, cette cargaison de nitrate d'ammonium est demeurée stockée dans des conditions précaires pendant sept longues années, avant de provoquer l'une des plus importantes explosions non nucléaires de l'histoire moderne.

Un bilan humain et matériel catastrophique

L'explosion du 4 août 2020 a ravagé la capitale libanaise, faisant plus de 235 morts et 6 500 blessés et causant des dégâts considérables aux infrastructures et aux biens. Cette tragédie demeure l'une des catastrophes les plus graves jamais survenues dans le pays.

Depuis la catastrophe, l'enquête judiciaire libanaise a été émaillée de nombreuses perturbations. Révocations de juges et de procureurs, pressions de personnalités influentes et du Hezbollah ont considérablement ralenti les investigations.

Le juge Tarek Bitar, nommé à la tête de l'enquête après la destitution de son prédécesseur, n'a pu reprendre ses travaux qu'en début d'année. Cette relance intervient après l'affaiblissement du Hezbollah dans le conflit avec Israël et la nomination de nouvelles autorités déterminées à rétablir l'ordre dans le pays.

Le tribunal de Sofia a approuvé la détention provisoire de Grachushkin pour une durée maximale de 40 jours. Les autorités libanaises disposent de cette période pour déposer leur demande d'extradition officielle accompagnée des documents requis.

Cette arrestation pourrait marquer un tournant décisif dans une enquête maintes fois entravée et accroître la pression sur le système judiciaire libanais pour faire aboutir ce dossier emblématique.

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