Il parle lentement, avec une précision presque clinique, comme s’il cherchait à remettre de l’ordre dans un cauchemar encore proche. Yosef Haim Ohana, 24 ans, l’un des otages israéliens libérés il y a deux semaines, a brisé le silence dans un entretien exclusif, ce soir, à Amit Segal sur N12.
Capturé au festival Nova, il a passé plus de 738 jours sous terre, prisonnier du Hamas dans les tunnels de Gaza.
« Un jour, un homme est entré furieux dans la pièce, a armé son pistolet et me l’a collé sur la tempe, raconte-t-il. Il m’a crié : Combien d’hommes as-tu tués ? J’ai répondu : Zéro. Il a voulu tirer. Puis un cheikh est intervenu, lui a saisi la main et lui a dit : Pas maintenant. »
Ce jour-là, il a échappé à la mort. D’autres fois, ses geôliers mettaient en scène des exécutions pour entretenir la peur : « Ils nous faisaient choisir qui tuer et qui seulement blesser. Ils appelaient ça une vengeance. »
Dans les tunnels, l’obscurité et la lumière étaient devenues les deux visages du même supplice : « Au début, on attendait les lampes, peut-être qu’ils apporteraient du thé, un peu d’eau. Puis on a compris. Dès qu’on voyait un faisceau, c’était la panique. On se demandait : Qui va être frappé ? »
Les coups, la faim, les humiliations : tout était calculé pour briser.
Pour survivre, Ohana a appris à penser comme eux. Il a caché qu’il était officier dans la brigade Givati et a tenté de convaincre ses gardiens qu’il valait mieux vivant que mort : « Je leur ai dit : si vous me tuez, vos prisonniers resteront en prison. Si je reste vivant, ils sortiront. »
Lui qui, dans les tunnels, avait dû parler arabe pour négocier chaque instant, avoue aujourd’hui : « J’essaie d’oublier cette langue. Je veux parler seulement hébreu. »
Mais au-delà de la survie, Yosef Haim Ohana confie qu'il a gardé la capacité d’aimer.