Les tensions entre le gouvernement israélien et une partie du monde juif progressiste ont franchi un nouveau cap cette semaine. Deux événements distincts, survenus à quelques jours d’intervalle, ont illustré la radicalisation du climat autour de la récolte des olives en Judée-Samarie : l’expulsion de Leila Stillman-Utterback, 18 ans, juive américaine originaire du Vermont, et la blessure d’un rabbin israélien lors d’une agression impliquant des colons armés et un drone militaire.

Arrêtée fin octobre alors qu’elle participait à une récolte d’olives organisée par Rabbins pour les droits de l’homme, Stillman-Utterback a été détenue, menottée, puis expulsée d’Israël avec interdiction d’y revenir avant dix ans. Les autorités israéliennes l’accusent d’avoir pénétré une zone militaire fermée près du village de Burin, en Judée-Samarie. L’audience autour de son expulsion, tenue uniquement en hébreu, s’est déroulée sans qu’elle comprenne qu’il s’agissait d’un jugement. Pour cette jeune diplômée issue d’une famille de rabbins et militante du mouvement sioniste socialiste Hashomer Hatzaïr, la sanction a un goût amer : “On m’a fait comprendre que, pour l’État d’Israël, je ne suis pas le bon type de Juive — peut-être même pas Juive du tout.”

Leila Stillman-Utterback gathers olives during a harvest in the West Bank in the fall of 2025, photo credit: Courtesy Stillman-Utterback
Quelques jours plus tard, dans le village de Deir Istiya, un groupe de rabbins américains venus en solidarité avec des paysans palestiniens a été pris pour cible par des habitants juifs des implantations armés. Un drone, opéré selon l’armée par des soldats israéliens, a frappé la rabbin Dana Sharon, la blessant à l’épaule. Peu après, un homme en uniforme partiel a tiré une balle réelle en l’air avant de s’enfuir.
L’armée a reconnu un “incident inhabituel” et promis des sanctions disciplinaires, sans fournir de détails.
Selon l’ONU, 126 attaques d'habitants juifs des implantations liées aux récoltes d’olives ont été recensées en octobre - un record. Les ONG dénoncent l’utilisation abusive des ordres de fermeture militaire pour empêcher les Palestiniens de cultiver leurs terres.
Pour Rabbi Jill Jacobs, directrice de l’organisation Té'ruah, ces incidents révèlent un choix politique clair :“Plutôt que de s’attaquer à la violence des habitants violents des implantations, le gouvernement préfère criminaliser les Juifs qui défendent la justice.”
Le choc est profond parmi les mouvements réformé, conservateur et reconstructionniste, qui ont dénoncé une “attaque contre des rabbins venus prêcher la paix et la coexistence”. La députée réformée Gilad Kariv doit soulever, ces jours-ci, l’affaire à la Knesset.