Israël

Cap sur le mont Hermon !

Les premières chutes de neige ont été observées au sommet le plus élevé d’Israël, un site très prisé des Israéliens durant la saison hivernale.

4 minutes
10 décembre 2025

ParNathalie Sosna Ofir

Cap sur le mont Hermon !
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Allez, enfilez vos moon boots ! Direction le mont Hermon, le toit blanc d’Israël, là où se trouve la seule station de ski du pays. Un site emblématique qui se prépare déjà à fêter un cap symbolique : ses 55 ans en 2026. Et le timing est parfait : depuis la nuit dernière, la neige tombe sur ce sommet culminant à 2 300 mètres d’altitude, sur les hauteurs du Golan.

De décembre à février – parfois jusqu’en mars – chaque shabbat dès 6 heures du matin, les Israéliens attendent fébrilement le bulletin météo pour savoir si le mont est enneigé et accessible.À la moindre annonce favorable, des milliers de voitures se ruent vers le mont Hermon, quitte à faire la queue plusieurs heures sur la route. On y vient en famille ou entre amis pour skier, faire de la luge ou du snowboard, et construire des bonhommes de neige, mais aussi pour admirer un panorama spectaculaire sur la Galilée et le Golan.

Même Shimon Peres, za"l, faisait des bonhommes de neige sur le Hermon

Avec près de 400 000 visiteurs par saison et une capacité d’accueil de 12 000 personnes par jour, la station est devenue un passage obligé de l’hiver israélien et l’une des plus développées du Moyen-Orient après Mzaar-Faraya, au Liban. Elle constitue aussi une source de revenus essentielle pour les communautés voisines de Neve Ativ et de la ville druze de Majdal Shams.

Temple de la glisse aujourd’hui, le mont Hermon fut longtemps une montagne sacrée. Un peuplement hébreu y était déjà attesté à la fin de l’époque du Second Temple. Son nom apparaît dans les textes sous plusieurs appellations – Sihon, Shanir, Sirion – issues d’une racine hébraïque signifiant « lieu sacré ». La Bible évoque « la rosée de l’Hermon qui descend sur les montagnes de Sion », allusion aux rivières issues de la fonte des neiges qui alimentent le Jourdain et le lac de Tibériade.

Surnommé les « yeux d’Israël », le mont Hermon occupe aussi une position géostratégique clé. Son sommet se partage entre Israël, la Syrie et le Liban, au cœur d’une zone de tension permanente. En raison de la proximité avec la Syrie, avec laquelle Israël reste officiellement en guerre, la station est fortement militarisée. Patrouilles de Tsahal, poste d’observation de Mitzpe Shelagim à 2 210 mètres d’altitude, entraînements de l’unité alpine : touristes et réservistes se croisent parfois sur les pistes. Le hors-piste reste strictement interdit, au risque de franchir une frontière sans s’en rendre compte.

Photo : Tsahl

L’idée de créer une station de ski dans un pays davantage associé aux plages et au soleil pouvait sembler improbable. Avec près de 200 kilomètres de littoral et plus de 300 jours d’ensoleillement par an, Israël évoque davantage les tongs que les doudounes. Pourtant, au début des années 1970, le projet répondait à un impératif économique : offrir des emplois aux populations locales, l’agriculture étant impossible sur ce site montagneux. Soutenu par l’Agence juive et le ministère du Tourisme, le projet voit le jour en 1972 avec l’installation de la première remontée mécanique. Les débuts furent modestes, mais l’afflux de visiteurs a rapidement imposé l’agrandissement du domaine, qui couvre aujourd’hui environ 2 434 dunams. Un projet d’hôtel intégré à la montagne est désormais à l’étude.

Côté ski, la station reste plus modeste que les grandes stations européennes, mais répond aux standards internationaux. Elle compte 13 pistes totalisant 45 kilomètres, du vert au noir, dont plusieurs homologuées par la Fédération internationale de ski comme pistes olympiques. Seize remontées mécaniques desservent le sommet. Les amateurs de snowboard disposent d’un snowpark, tandis qu’une luge sur rail de 950 mètres serpente les pentes voisines. Au pied des pistes, une aire de luge accueille les enfants, où l’on façonne des bonshommes de neige coiffés de kippas ou de bérets prêtés par les soldats, toujours prompts à jouer le jeu.

Poètes et dirigeants ont nourri la mythologie du lieu. Le mont Hermon est surnommé le « grand-père d’Israël », une expression popularisée dès 1927 par le poète Haim Hefer et reprise plus tard par David Ben Gourion. Dans le monde arabe, on l’appelle Jabal al-Cheikh, la montagne du vieux, en référence à la manière singulière dont la neige y fond, en longs sillons évoquant une barbe blanche.

Ironie : Israël n’est pas un pays de neige, mais il en exporte. La société israélienne IDE Technologies a développé un canon à neige utilisé depuis 2006 dans la station suisse de Zermatt, permettant aux skieurs de pratiquer même lorsque la neige se fait rare.

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