Dans un contexte de tensions diplomatiques croissantes avec plusieurs pays occidentaux s'apprêtant à reconnaître un État palestinien, à commencer par la France, Israël semble décidé à riposter en prenant des mesures concrètes vers l'annexion de la Judée-Samarie.
"Soit la souveraineté, soit le 7 octobre" : c'est par ce slogan choc que le Conseil de Yesha a lancé une campagne pour l'application de la souveraineté en Judée-Samarie. Dans une vidéo saisissante, l'organisation dépeint un scénario apocalyptique : "Ils ont franchi la clôture à Qalqilya. Ils voyagent en camionnettes et en motos vers Kfar Saba... Des milliers de terroristes se sont infiltrés en territoire israélien depuis les territoires de Judée-Samarie."
Cette campagne de communication s'accompagne d'un lobbying politique intense. Le ministre des Affaires stratégiques Ron Dermer a formellement proposé, lors de discussions gouvernementales à huis clos, la promotion de la souveraineté israélienne en Judée-Samarie, selon les informations d'Israël Hayom.
Ultimatums européens et plan d'annexion
Ron Dermer a directement confronté les capitales européennes. Lors d'entretiens avec le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot et son homologue britannique David Lammy, il a averti qu'Israël "prendrait des mesures unilatérales" en cas de reconnaissance d'un Etat palestinien.
Le ministre des Affaires étrangères Gideon Sa'ar a renforcé ce message : "Les actions unilatérales contre Israël entraîneront des actions unilatérales de la part d'Israël", a-t-il déclaré lors de discussions directes avec ses homologues.
Ces menaces prennent une dimension concrète avec le plan élaboré par le Conseil de Yesha : application de la loi israélienne à 65% du territoire de Judée-Samarie, les résidents arabes étant cantonnés dans "20 cantons indépendants qui ne constituent pas une entité nationale unifiée".
Offensive diplomatique à Washington
Le président du Conseil de Yesha, Yisrael Gantz, a présenté la semaine dernière cette stratégie à de hauts responsables de l'administration Trump. Lors de réunions à la Maison Blanche, au Département d'État et au ministère de la Défense, il a martelé son argumentaire sécuritaire.
Les chiffres présentés aux Américains sont éloquents : "6 000 terroristes ont envahi Israël depuis Gaza, tandis qu'il y a 40 000 terroristes dans les territoires de l'Autorité palestinienne en Judée-Samarie." Gantz a souligné que si la frontière Gaza-Israël ne s'étend que sur 20 kilomètres, "la Ligne verte s'étend sur 350 kilomètres".
"Un feu vert américain pour une telle démarche est le seul moyen d'empêcher la création d'un État palestinien à l'avenir", a-t-il plaidé, liant directement les efforts diplomatiques français à l'urgence d'une annexion préventive.
La conférence de Paris en ligne de mire
Cette mobilisation israélienne vise spécifiquement la conférence internationale franco-saoudienne prévue à New York du 17 au 20 juin, destinée à obtenir une reconnaissance unilatérale d'un État palestinien. Jérusalem "rejette fermement l'initiative de Macron" et l'accuse de "déformer les valeurs et la morale au regard du massacre du 7 octobre".
Si les États-Unis ont clairement fait savoir qu'ils ne participeraient pas à cette conférence, et que l'Allemagne rejette l'initiative française, l'Espagne et Malte entendent la soutenir. Le Premier ministre maltais Robert Abela a d'ailleurs annoncé dimanche que son pays envisageait de reconnaître un État palestinien "dès le mois prochain".
Le président américain pourrait être la clé de voûte de cette stratégie israélienne. Trump avait laissé entendre au début de son mandat qu'une mesure visant à appliquer la souveraineté faisait partie de sa "boîte à outils". Interrogé en février, il n'avait pas exclu cette option, affirmant qu'une "annonce à ce sujet est attendue d'ici un mois".