Le dîner annuel du CRIF s’est tenu hier soir, jeudi, au Carrousel du Louvre, dans un contexte de la montée de l’antisémitisme en France et de la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza. Autour de la table, de nombreuses personnalités politiques françaises, entre autres le président du Sénat Gérard Larcher, mais pas le Rassemblement national qui selon le président du CRIF, Yonathan Arfi « n'a pas su regarder son histoire en face ni rompre avec l’antisémitisme qui a marqué son passé. » ni La France insoumise.
Alors qu'il boudait l'évènement depuis plusieurs années, le 1er ministre François Bayrou était présent pour cette 39ème édition. Dans un discours ferme, il a dénoncé « la bête délirante et meurtrière » de l’antisémitism e et réaffirmé l’engagement du gouvernement à le combattre sans relâche. Il a annoncé plusieurs mesures : l’envoi d’une circulaire aux parquets pour mieux identifier et poursuivre les actes antisémites, sur la base de la définition de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste ; le renforcement du parquet national chargé de la lutte contre la haine en ligne ; et le développement de la plateforme Pharos, destinée à signaler les contenus haineux sur Internet.
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Sur le plan éducatif, François Bayrou a également plaidé pour l’intégration dans les programmes d’histoire d’une étude approfondie des mouvements d’émancipation nationale au Moyen-Orient, afin de donner des clés de compréhension du conflit israélo-palestinien aux jeunes générations.
Sur le plan international, Bayrou a rappelé les équilibres "subtils" que la France tente de maintenir. Il a réaffirmé le droit d’Israël à vivre en sécurité, dénoncé les menaces iraniennes, mais aussi pointé les « inquiétudes » françaises face à la situation humanitaire à Gaza. « Il ne pourra pas y avoir d’équilibre fondé sur le droit tant qu’Israël ne sera pas reconnu dans sa légitimité », a-t-il martelé, tout en appelant à une paix durable qui passe par « une solution à deux États, un cessez-le-feu et la libération de tous les otages ».
Avant le discours du 1er ministre, Yonathan Arfi, fraîchement réélu à la tête du CRIF, a dressé un tableau de la situation en France. Il a dénoncé un « antisémitisme d’atmosphère » qui contraint trop souvent les Juifs à cacher leur identité dans l’espace public : « Faut-il retirer la mezouza de nos portes, dissimuler son étoile de David ? Je refuse que les Juifs choisissent entre leur identité et leur sécurité .»
Il a rappelé les actes graves survenus ces derniers mois : une fillette violée à Courbevoie, des synagogues incendiées à Rouen et à La Grande-Motte, des rabbins agressés, comme le rav Elie Lemmel attaqué par deux fois à Deauville et à Neuilly sur Seine, présent dans la salle. Citant Robert Badinter, il a dénoncé le retour des « Mort aux Juifs », alimenté par l’islamisme radical et certains discours politiques populistes.
Sans détour, Yonathan Arfi a fustigé Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise, accusés d’« hystériser » le débat et de sacrifier la République au « communautarisme assumé » : « La gauche doit se démélenchoniser », a-t-il asséné, appelant à marginaliser l’influence de LFI. Il a également dénoncé les accusations de « génocide » portées contre Israël, qualifiées de réactivation laïque de l’antique calomnie de peuple déicide.
Rappelant l’enracinement millénaire des Juifs en France, de Rachi à Simone Veil, il a plaidé pour que leur histoire soit enseignée dans les écoles au-delà de la seule Shoah. Il a également exigé la libération immédiate des 50 otages israéliens encore détenus par le Hamas, citant notamment l'ex-otage Shoshan Haran, enlevée le 7 octobre du Kibbutz Béeri, présente dans la salle et chaleureusement applaudie.
Yonathan Arfi a conclu son intervention par un appel à l’unité nationale : « Lutter contre l’antisémitisme, c’est rassembler tous les Français », plaidant pour une école républicaine, une laïcité ferme et une justice intransigeante face à la haine.