Sur fond de décision de l’Allemagne de suspendre les exportations d’armes vers Israël susceptibles d’être utilisées dans la guerre à Gaza, Volker Beck, président de la commission des relations Allemagne–Israël au Bundestag, a mis en garde ce matin contre une éventuelle mesure de rétorsion israélienne visant à restreindre ses propres livraisons d’armes à Berlin.
L’élu rappelle que la société israélienne Elbit Systems doit fournir à l’armée de l’air allemande des systèmes de défense antimissiles pour un montant de 260 millions de dollars. Selon lui, une remise en cause de ce contrat « pourrait assombrir l’avenir de la sécurité aérienne allemande ».
Jusqu’à présent, l’Allemagne s’était abstenue de déclarations aussi radicales contre Israël, et s’était même opposée à l’exclusion de ce dernier du programme de recherche et développement Horizon Europe. Berlin est le deuxième fournisseur d’armes d’Israël, après les États-Unis, mais elle est aussi un important client de l’industrie israélienne, achetant notamment des systèmes d’interception de missiles.
Dans le cadre de l’accord avec Elbit, l’entreprise israélienne doit équiper les avions de transport de l’armée de l’air allemande de systèmes de protection antimissiles. Ils visent à protéger les aéronefs des menaces de missiles sol-air à guidage infrarouge, notamment tirés depuis des systèmes mobiles. Un modèle similaire équipe également l’avion présidentiel français.
Vendredi, le chancelier allemand Friedrich Merz a annoncé que son gouvernement “ne donnera plus son feu vert, jusqu’à nouvel ordre, à aucune exportation de matériel militaire vers Israël susceptible d’être utilisé dans la bande de Gaza”. S’il a réaffirmé “le droit d’Israël à se défendre face au terrorisme du Hamas” et insisté pour qu’ “aucun rôle ne soit laissé au Hamas dans l’avenir de Gaza”, il a exprimé “une profonde inquiétude pour la population civile de Gaza”. Selon lui, la décision israélienne de conquérir Gaza rend difficile la réalisation des objectifs de libération des otages et de désarmement du Hamas, d’où sa décision d’instaurer un embargo sur les armes.
Merz a précisé que “les efforts pour un cessez-le-feu et la libération des otages restent la priorité absolue”, tout en exhortant Israël “à ne pas franchir d’étapes supplémentaires vers l’annexion de la Judée-Samarie”.
Selon le bureau du Premier ministre, Benjamin Netanyahu s'est entretenu avec Merz auquel il a fait part de “déception” qu’un pays comme l’Allemagne adopte une telle position : “Au lieu de soutenir la juste guerre d’Israël contre le Hamas, qui a commis l’attentat le plus meurtrier contre le peuple juif depuis la Shoah, l’Allemagne récompense le terrorisme du Hamas en imposant un embargo sur les armes.”
Face aux critiques internationales sur la décision d’“occuper Gaza”, Netanyahu a assuré à Merz que “l’objectif d’Israël n’était pas de prendre le contrôle de Gaza, mais de la libérer du Hamas et de permettre la mise en place d’un gouvernement pacifique”. Le ministre de la Défense Israel Katz a renchéri : “Les pays qui condamnent ou menacent de sanctions ne nous feront pas fléchir. Le temps est révolu où les Juifs ne se défendaient pas eux-mêmes.”
En 2023, l’Allemagne a fourni à Israël pour 326,5 millions d’euros d’armes et d’équipements militaires, dont des milliers d’obus de chars, des composants pour systèmes de défense aérienne, du matériel de communication, 3 000 armes antichars portatives et 500 000 munitions pour armes automatiques ou semi-automatiques. La majorité des licences d’exportation concernait des technologies de développement, maintenance et réparation d’armements, ainsi que des véhicules militaires — des éléments essentiels pour maintenir les capacités opérationnelles de Tsahal.