Depuis plusieurs mois, des démarches sont en cours pour promouvoir la nomination de Samir Hulileh, un homme d’affaires palestinien influent, au poste de gouverneur de la bande de Gaza.
Selon des documents déposés auprès du ministère américain de la Justice, cette initiative vise à installer dans la Bande de Gaza un responsable agissant sous l’égide de la Ligue arabe, accepté à la fois par Israël et les États-Unis, afin de préparer « le jour d’après » la guerre en matière de gouvernance.
Parmi les promoteurs de cette candidature figure Ari Ben-Menashe, lobbyiste auprès de la Maison Blanche, ancien Israélien établi au Canada. Selon lui, l’initiative a pris de l’ampleur ces dernières semaines, notamment à la suite de réunions tenues aux États-Unis et de contacts établis par Hulileh en Égypte.
Résidant à Ramallah, Hulileh est économiste de formation. Il est une figure bien connue de la scène politique et économique palestinienne. Il a occupé plusieurs postes de haut niveau au sein de l’Autorité palestinienne, notamment secrétaire général du gouvernement en 2005 et sous-secrétaire au ministère de l’Économie et du Commerce. Il a également présidé le conseil d’administration de l’Institut palestinien de recherche en politique économique, siégé au conseil du Centre palestinien du commerce, dirigé le groupe d’investissement PADICO et présidé la Bourse palestinienne. Proche de l’homme d’affaires Bachar al-Masri, milliardaire palestino-américain à l’origine de la ville nouvelle de Rawabi et disposant de bons liens avec l’administration Trump, Hulileh bénéficie d’un solide réseau d’influence.
D’après les documents déposés aux États-Unis, Ben-Menashe s’est enregistré comme lobbyiste pour Hulileh il y a plusieurs mois, avec pour objectif déclaré d’influencer les décideurs américains en faveur de sa nomination. Le projet repose sur l’idée que toutes les parties concernées préféreraient voir Gaza administrée par une personnalité palestinienne sous l’égide des États-Unis et de la Ligue arabe.
L’initiative a débuté l’an dernier, en fin de mandat de Joe Biden, mais n’a pris son essor qu’après l’entrée en fonction de Donald Trump. D’autres documents indiquent que Ben-Menashe a abordé le sujet avec des interlocuteurs au Qatar, en Arabie saoudite et en Égypte.
Les documents déposés aux États-Unis évoquent un plan comprenant le déploiement de forces américaines et arabes à Gaza, la reconnaissance par l’ONU d’un statut spécifique pour le territoire, la location de terrains en Égypte pour la construction d’un aéroport et d’un port maritime dans le Sinaï, ainsi que des droits d’exploitation de gaz au large de Gaza.
Selon Hulileh, la condition préalable à toute avancée est un cessez-le-feu permanent, la libération de tous les otages et la fin de la guerre : « Ce n’est qu’alors que nous pourrons parler du jour d’après », a-t-il déclaré. Il se voit alors comme un « chef de projet » pour la reconstruction de Gaza, prévoyant un afflux massif d’aide humanitaire — entre 600 et 1 000 camions par jour — et l’ouverture de quatre ou cinq points de passage libres de toute restriction israélienne pour les marchandises.
Il juge également nécessaire de rétablir l’ordre et la loi dans l’enclave : « Les habitants doivent sentir qu’il existe une autorité — ni celle de l’Autorité palestinienne, ni celle du Hamas — qu’ils respectent », affirme-t-il. Selon lui, Gaza ne doit pas rester saturée d’armes issues du Hamas ou du Jihad islamique, afin que la population se sente en sécurité. Celui qui se voit gouverneur de la Bande de Gaza estime que le pouvoir sécuritaire doit être intégralement entre ses mains pour pouvoir gérer le territoire convenablement. Il reconnait néanmoins que sur ce plan, la situation est encore loin d'être réglée et demeur complexe: qui assurera la sécurité dans la Bande de Gaza? Jusqu'où le Hamas sera prêt à se retirer? Quel rôle pour l'armée israélienne?
Hulileh estime que la reconstruction nécessiterait environ 53 milliards de dollars, un montant que les pays du Golfe seraient prêts à investir, à condition que les États-Unis et l’Union européenne contribuent également de manière significative.