Après la frappe spectaculaire de Tsahal contre des dirigeants du Hamas au Qatar, Ankara hausse le ton. Le porte-parole du ministère turc de la Défense, l’amiral Zeki Akturk, a mis en garde dimanche contre le risque qu’Israël « élargisse ses frappes inconsidérées et entraîne toute la région dans une catastrophe ». Ces propos reflètent l’inquiétude croissante en Turquie, où plusieurs hauts cadres du Hamas vivent depuis des années.
En Israël, plusieurs ministres n’ont pas exclu de viser les chefs du mouvement islamiste jusque sur le sol turc. Zeev Elkin (camp national-unitaire) a affirmé que « partout dans le monde, il faudra les poursuivre et régler les comptes ». Même ton du côté du ministre de l’Énergie Eli Cohen, qui a déclaré au média saoudien Ilaaf : « Tout responsable lié au Hamas ne peut dormir tranquille nulle part dans le monde. »
L’escalade verbale s’inscrit dans un climat déjà délétère. Les relations entre Israël et la Turquie, détériorées depuis plus d’une décennie, ont atteint un point de rupture avec la guerre à Gaza. Recep Tayyip Erdogan, allié de longue date du Hamas, compare désormais régulièrement Benjamin Netanyahu à Hitler. Israël accuse de son côté Ankara d’offrir une base logistique, financière et opérationnelle au mouvement islamiste, aux côtés de l’Iran, du Liban et du Qatar.
Les menaces israéliennes ravivent aussi la rivalité stratégique en Syrie, où la Turquie soutient le nouveau gouvernement intérimaire alors que Tsahal multiplie les frappes pour protéger les minorités druzes et contrer l’influence iranienne. Dans l’est de la Méditerranée, Israël se rapproche de la Grèce et de Chypre, au grand dam d’Ankara, qui maintient une présence militaire dans la partie nord de l’île.
Erdogan tente néanmoins de garder une carte diplomatique ouverte. Après avoir signé un accord de coopération militaire avec Damas, il cherche à limiter la confrontation directe avec Israël et compte sur Washington pour fixer une « ligne rouge » à Netanyahu. Mais comme le note un expert turc cité par la presse locale, « l’attaque au Qatar a montré qu’il n’y a pas de limites à ce que le gouvernement israélien est prêt à faire ».