Les services de sécurité israéliens observent une montée en puissance des capacités militaires des Houthis au Yémen : fabrication locale de missiles et de drones-suicides, ateliers souterrains pour la production et le stockage, et mise en place de formations visant à reproduire une attaque de grande ampleur similaire à celle du 7 octobre, depuis l’Est.
Les renseignements militaires israéliens décrivent un modèle de « protection naturelle » inspiré par l’Iran. Des sites creusés dans la roche et des ateliers dissimulés dans des zones reculées servent à fabriquer et entreposer des missiles lourds et des moyens aériens suicides. Ce schéma rappelle l’effort iranien de substitution à l’importation, déjà observé chez d’autres proxy de Téhéran au Proche‑Orient. Tsahal estime que l’ennemi accélère son autonomie technologique. Les attaques sur les ports contrôlés par les Houthis et la pression internationale sur les lignes d’approvisionnement n’empêchent pas l’apparition d’un parc local de production capable, à terme, de réduire la dépendance aux flux extérieurs.
Parallèlement à l’industrialisation souterraine, Israël suit de près un programme d’entraînement houti baptisé « Tufan al‑Aqsa » - Inondation d’al‑Aqsa-. dont la mission est de former des miliciens à mener une incursion massive depuis des pays situés à l’est d’Israël — la Jordanie ou la Syrie — dans l’objectif d’organiser des attaques à grande échelle à l'image de celles du 7 octobre. Les cours se tiennent au Yémen ; l’appui logistique et l’encadrement technique proviennent, selon les analystes, d’éléments liés à l’Iran.
Face à cette menace, le renseignement militaire israélien -Aman- a lancé une réponse interne : création de deux unités nouvelles dédiées à l’étude et au démantèlement des réseaux houthistes composées de dizaines d’enquêteurs et d’analystes, mobilisés sur la traque des centres névralgiques houthistes et sur la désignation de cibles opérationnelles. L’objectif déclaré : neutraliser la capacité houtie à produire, dissimuler et diffuser des vecteurs d’attaque précis avant qu’ils n’atteignent une masse critique.
Washington a, lui, intensifié la pression financière contre les Houthis : le Trésor américain a imposé des sanctions à des entités soupçonnées de faciliter les transferts de fonds vers le mouvement. Les autorités israéliennes jugent ces mesures utiles mais insuffisantes pour enrayer la logique d’autoproduction adoptée par les relais iraniens.
Les leçons tirées d’incidents antérieurs jouent un rôle opérationnel. Israël évoque des tentatives similaires d’implantation industrielle en Syrie, notamment des projets de production de missiles pour le Hezbollah à Masyaf, que les forces israéliennes ont frôlé ou détruit au cours d’opérations ciblées. L’état‑major affirme vouloir empêcher que les Houthis n’atteignent, à terme, un stock de missiles précis et nombreux susceptible de constituer une « menace existentielle » pour Israël.
Selon les évaluations militaires, la consolidation d’un tel « écosystème » houthiste -savoir‑faire iranien, ingénierie locale, sites souterrains - représente un défi stratégique nouveau. Tsahal se prépare à frapper les maillons essentiels de cette chaîne dès que la nature et l’emplacement des cibles seront confirmés. L’option militaire complète la pression diplomatique et économique, dans l’espoir d’empêcher l’émergence d’un pôle houti capable de projeter une menace de longue portée.