Culture

Les Aventures Extraordinaires de Moïse Levy SAISON 2 - Episode 17 - L'avenir appartient aux ambitieux

Kibboutz Shtetl Gan Eden, Israël Recruté par le Mossad, Moïse Levy n’est jamais retourné sur le terrain depuis 26 mois. Il a repris le cours tranquille de sa vie au kibboutz, une existence rythmée par les lois de la terre et celle des saisons, loin du tumulte du monde.

6 minutes
26 septembre 2025

ParGuitel Benishay

Les Aventures Extraordinaires de Moïse Levy SAISON 2 - Episode 17 - L'avenir appartient aux ambitieux

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Yaël conduit nerveusement. Moïse balance son téléphone à Dov.

 « Appelle Nikita de ma part. S’il te prend, tu descends avec nous à Tel-Aviv. »

Assis à l’arrière, Dov compose le numéro. Le téléphone sonne. Une musique klezmer. Dov fronce les sourcils. Nikita décroche.

Nikita, d’une voix enjouée : « Shalom, shalom, Karagül ! Je savais que tu allais m'appeler, j’ai rêvé de toi cette nuit. Tu portais une cape et tu distribuais des loukoums parfumés à la rose noire ! »

Dov, riant : « C’est Dov, le fils de Moïse. »

 « Ah, Karagül junior ! Ton père est toujours aussi technophobe ? Nu, dis-moi, qu’est-ce qui amène ta voix douce à mon oreille ? »

 « Je fabrique des bougies artisanales. Des merveilles. Senteurs de Jérusalem, cire d’abeille pure, mèches dans l’huile d’olive. Il faut vendre sur internet. J’ai besoin de belles photos. »
Un silence. Nikita reprend : « J’imagine que tu utilises l’intelligence artificielle ? »

 « Ani met ! J’adore. Pour le marketing, pour les posts Insta, pour les campagnes. J’ai testé Claude, ChatGPT, MidJourney, Runway, Canva AI, tout ça. »

 « JE suis en croisade contre l’IA. Tu joues avec le feu, Karagül junior. »

 « Eizeh feu ? Pourquoi ? »

« Parce que rien n’est vraiment confidentiel. J’ai vu des cas… l’IA balance des conversations entières en ligne. »

 « Yalla, sérieux ? Israel est champion du monde de l’IA. Nous représentons 20% de l’IA mondiale. »

 « C’est ma crainte. Imagine. Si l’IA décide que les fabricants de bougies doivent disparaître… Toi, tu as déjà tout donné, où tu vis, comment tu vis. GPS, habitudes, … »

 « C’est de la science-fiction. Qui voudrait tuer des fabricants de bougies ? »

Nikita, soudain grave : « Tous les gays de Tel Aviv alors. Et cette fois, c’est moi et la moitié de mes amants qui serions ciblés. »

Dov éclate de rire : « Ata meshuga, Nikita ! »

« Les fous ce sont ceux qui nous gouvernent et … les optimistes. Au moment de la Shoah les optimistes ont fini à Auschwitz. »

« Et les pessimistes ? »

« A Hollywood. » 

Cette fois-ci Dov éclata de rire franchement.

« Je te fais rire, tant mieux. Beseder. Tu sais que mon studio est Hollywood pour objets inanimés. Lumière, profondeur, mise en scène… Nikita Photography Center ! »

Dov, riant toujours : « Sérieux, ça existe ? J’ai mes échantillons. On peut passer à Tel-Aviv. »

 « Moi, je te fais ça avec amour. Chaque bougie devient une star de cinéma. »

 « C’est des bougies, pas des mannequins. »

 « Tu sous-estimes la photogénie d’une flamme ! Ça peut être un symbole, un voyage… Nu, tu veux du minimaliste ou du grandiose ? »

Dov s’accroche à sa ceinture alors que Yaël change de direction : « Simple et efficace. »

 « Compris. Deux heures. Amène-moi tes flammes, je leur donnerai leur heure de gloire. »

 « Toda raba, Nikita. »

« Nye za chto ! Et amène ton père, que je lui parle de mes loukoums parfumés. »

 

Sderot Rothschild, Tel-Aviv, Israël

L'air était suffocant à Tel-Aviv, alourdissant l'atmosphère et accentuant la tension qui pesait sur Ephraim. Il sirotait un café dans un kiosque, à l'angle de Herzl St. Il appréciait la brise méditerranéenne qui tentait d'atténuer la chaleur étouffante, mais rien ne pouvait dissiper son inquiétude croissante. Depuis quelques semaines, il sentait que les choses s'accéléraient, mais il ignorait encore dans quelle direction.
Un jeune homme en survêtement passa près de lui, sans s'arrêter, et lui glissa quelques mots presque imperceptibles : « Il veut te voir. »

Sans un mot, Ephraim se leva et suivit le messager. Quelques minutes plus tard, ils s'engouffrèrent dans un parking souterrain. Il n'était pas surpris d'y retrouver Al-Salem, installé avec nonchalance à l'arrière d'une limousine aux vitres teintées. Son chauffeur, impassible, tenait la portière ouverte.
Al-Salem l'observa un instant avant de rompre le silence. « Je t'ai débarrassé d'un problème, mais maintenant, il faut penser à protéger mes employeurs. »

Ephraim soutint son regard. Il connaissait le jeu d'Al-Salem. Chaque faveur avait un prix, et celle-ci s'annonçait élevée. « Tu parles du Qatar ? » demanda-t-il d'un ton neutre.

Al-Salem ne répondit pas. Son silence était une confirmation en soi.

Ephraim haussa les épaules et soupira : « T'as assez de gars pour régler tes problèmes ? L'abruti est dans le coffre ? Ouvre et je te donne l’adresse du rdv. »

Un sourire narquois étira les lèvres d'Al-Salem. Il fit un signe à son chauffeur, qui ouvrit le coffre de la limousine. Ephraim s'approcha et découvrit Jarod, gisant dans un état pitoyable. Son visage tuméfié, sa chemise maculée de sang, il était méconnaissable. Ephraim inspira profondément. Il n'éprouvait ni compassion ni haine. Juste la lassitude d'un homme habitué à faire le sale boulot. Il sortit son arme et tira quatre balles. Le silence qui suivit fut plus assourdissant que les détonations.
Al-Salem et son chauffeur s'étaient jetés au sol. Lorsque la tension retomba, Ephraim leur donna une adresse avant de s'éloigner en marmonnant : « J'suis pas une babysitter. »

Mais alors qu'il s'éloignait, Al-Salem le rappela. « Attends ! »

Ephraim fit demi-tour. L'homme dans la limousine le fixait avec intensité. « Je n'ai pas d'équipe en Israël aujourd'hui. Combien veux-tu pour faire le job ? »

Ephraim n'hésita pas. « Dix millions de shekels. »

Un sourire apparut sur le visage d'Al-Salem. « Tu les auras. »

 

Park Tzameret, Tel-Aviv devant le « Nikita Photography Center »

Dans la voiture de Yaël, l'air lourd et moite s'insinuait par les interstices des fenêtres. Le silence était entrecoupé par les bavardages incessants de Dov.

« Aba, c'est gentil de me mettre en contact avec Nikita. J'ai vu son site, les photos sont magnifiques. Vous savez, l'avenir appartient aux ambitieux, et moi, je vais devenir le roi de la bougie in the world ! Sababa ! »

Yaël sourit et lui adressa un regard bienveillant.

 « Ravie de t'avoir connu, Dov. »

Dov lui adressa un clin d'œil charmeur avant de se tourner vers Moïse.

 « Moi aussi, je t'aime, Aba. Ata ha’melech shel ha’bougie ! »

Moïse leva les yeux au ciel. « Nu, rak zeh ma shehassarti, un fils mégalomane… »

Dov s'apprêtait à descendre du véhicule, un sac avec des bougies multicolores contre sa poitrine, lorsqu'un grondement sourd fit vibrer l'air. Une fraction de seconde plus tard, un camion fonça droit sur eux. Le monde sembla basculer dans une tempête de métal et de verre brisé.

 

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