Moyen-Orient

Accord Israël-Hamas : les questions brûlantes du “jour d’après”

Alors que l’émotion nationale se concentre sur le retour des otages, un autre dossier se dessine en silence : celui des zones d’ombre d’un accord historique, dont les conséquences pourraient façonner l’avenir sécuritaire et politique de toute la région.

3 minutes
10 octobre 2025

ParDelphine Miller

Accord Israël-Hamas : les questions brûlantes du “jour d’après”
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Si l’opinion publique israélienne ne voit pour l’instant qu’une seule chose — le retour attendu des otages encore détenus à Gaza —, les négociateurs, eux, savent que le véritable défi ne fait que commencer. Une série de questions cruciales restent sans réponse, et elles pourraient décider du succès… ou de l’implosion du nouvel ordre post-guerre.


1. Qui vérifiera que le Hamas se désarme réellement ?

Le document officiel évoque un engagement du Hamas à abandonner ses armes, sous supervision du Qatar, de la Turquie et de l’Égypte. Mais aucun mécanisme concret n’explique comment l’organisation sera obligée de remettre non seulement ses missiles lourds… mais aussi son “dernier fusil”, ses derniers lance-roquettes RPG, ses caches souterraines. Israël refuse de se fier aveuglément aux garants arabes — mais n’a pas encore obtenu sa place dans ce dispositif.

Que se passera-t-il si, demain, Ankara ou Le Caire déclarent : “Le Hamas est désarmé” — et que Tsahal n’y croit pas ?


2. Qui gouvernera Gaza ? Tony Blair… et des armées arabes ?

Le président Trump prévoit de créer une « Conseil de paix » dirigée par l’ex-Premier ministre britannique Tony Blair, avec des représentants de pays musulmans et peut-être d’institutions financières internationales. À côté, une force militaire interarabe pourrait entrer à Gaza — avec des soldats d’Indonésie, des Émirats, peut-être même d’Arabie saoudite.

Mais selon quelles règles ? Sous quelles ordres ? Et surtout : comment éviter les incidents armés avec Tsahal, encore présente sur le terrain tant que le désarmement ne sera pas certifié ?


3. Reconstruction : aide humanitaire ou jackpot pour les puissances ?

Donald Trump veut injecter des dizaines de milliards de dollars dans la reconstruction de Gaza. Officiellement pour rebâtir les immeubles. Officieusement… de nombreuses familles puissantes lorgnent déjà sur le chantier : la sienne, celle d’Erdogan, les États du Golfe — et même certains ministres israéliens qui rêvent d’une « riviera de Gaza » profitable aux promoteurs.

Mais qui garantira que cet argent ne repartira pas dans les tunnels ? Et surtout : où vivront les Gazaouis en attendant ? La majorité de la bande est aujourd’hui inhabitable. Des centaines de milliers d’habitants sont toujours dans des tentes. Une bombe sociale en attente d’explosion.


4. Israël se retirera-t-il vraiment ? Et à quelles conditions ?

Le retrait progressif de Tsahal jusqu’au périmètre défini par le plan Trump est conditionné… au respect de l’accord par le Hamas. Mais rien n’indique ce qui se passera si le processus cale. Et surtout : l’engagement américain donné au Qatar et à la Turquie interdit à Israël de reprendre les combats sans concertation.

Autrement dit : Israël a-t-il encore la liberté d’agir ?


Conclusion provisoire :

L’accord qui rapporte les otages ouvre une nouvelle ère. Mais il pose aussi une question fondamentale : avons-nous signé un chemin vers la paix… ou vers une nouvelle dépendance stratégique et politique ?

Le soulagement d’aujourd’hui n’efface pas l’incertitude de demain. Et le « dernier fusil » du Hamas n’a pas encore été déposé.

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