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« Il s’est battu pour les otages – c’était son testament »

Alors qu’Israël célèbre la libération des premiers otages et salue la fin de la guerre, les familles endeuillées rappellent le prix payé pour en arriver là. et lancent un appel : « N’oubliez pas. »

6 minutes
13 octobre 2025

ParNathalie Sosna Ofir

« Il s’est battu pour les otages – c’était son testament »
Rif Haroush, Avraham Azoulay, Sharia Elboïm et Tal Lahat zal , Photo : porte-parole de Tsahal.

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Le père du sergent Rif Haroush déplore que « l’on brandisse des pancartes “Merci Trump” au lieu de rendre hommage aux soldats tombés ». Les parents de Tal Lahat sont allés au cimetière « pour partager avec lui le moment qu’il attendait et pour lequel il s’est battu ».
La mère de Sharia Elboïm parle de « jours de joie enveloppés des noms de ceux qui ne reviendront pas », et Ruth Azoulay, veuve du réserviste Avraham Azoulay, évoque « la mission qu’il reste encore à accomplir ». Quatre familles endeuillées partagent une joie teintée de douleur et lancent un appel : « N’oubliez pas. »

« Heureux pour eux, mais triste pour mon fils »

Avi Haroush, père du sergent Rif Haroush z’’l, tombé en avril 2024 dans le sud de la bande de Gaza, confie des sentiments mêlés :« Je suis heureux pour eux et triste pour mon fils. Il n’y a pas d’autre manière de le dire. Qu’on n’oublie pas grâce à qui les otages rentrent à la maison. Pas grâce à Trump ni à personne d’autre, mais grâce aux 915 soldats et soldates tombés au combat. Il ne faut pas l’oublier, surtout maintenant, alors que la bataille des crédits commence. »

Il appelle à transformer ces jours historiques en moments de mémoire et de lien :« Les otages rentrent grâce à eux, et personne ne me convaincra du contraire. C’est une joie remplie de lumière, mais aussi de tristesse. Il faut se rappeler comment on en est arrivés là. »

Le père s’indigne de voir les familles endeuillées devoir rappeler elles-mêmes le sacrifice de leurs proches : « C’est douloureux que les familles doivent se battre pour qu’on se souvienne d’elles. Cela devrait venir de la société, des médias. Au lieu de pancartes “Merci Trump”, on devrait afficher de grands panneaux pour les soldats tombés. »

« Il s’est battu pour les otages – c’était son testament »

Ronit et Ran Lahat, parents de Tal Lahat z’’l, tombé en juillet 2024 lors des combats dans le centre de Gaza, ressentent la même ambivalence : « Tal s’est battu pour ramener les otages. Il le répétait sans cesse. Il était en permission chez nous quand quatre otages ont été libérés, et il était frustré de ne pas y avoir participé. Nous ressentons le besoin de poursuivre son testament. »

Tal, membre de l’unité Maglan, s’est illustré à Nahal Oz dès les premières 48 heures de la guerre : son unité a permis de sauver environ 400 civils, dont 150 enfants. Neuf mois plus tard, en juillet 2024, il a été tué par un tireur embusqué.

Sa mère raconte : « Quand nous avons entendu parler de l’accord, la première chose que nous avons faite a été d’aller au cimetière. C’est le moment qu’il attendait et pour lequel il s’est battu. On se réjouit du retour des otages, mais on sait que notre fils, lui, ne reviendra pas. Le cœur se déchire. »

Son père ajoute : « Je suis allé lui dire : “On ramène les otages, c’est pour ça que tu t’es battu.” Ce moment marque aussi la fin de la guerre. Nous ne voulons plus d’autres soldats tués. Nous voulons que ceux qui servent aujourd’hui rentrent en vie, pas comme lui. »

Ronit se souvient du rêve de son fils : devenir réalisateur : « Il avait écrit sur un autocollant : “Si tu as un rêve, pourquoi ne pas le crier ?” Tal parlait de cinéma, moi je parle du rêve de ramener les otages. Que chaque parent puisse étreindre son enfant. Il était l’enfant le plus vivant qui soit. » Depuis sa mort, la famille milite pour la libération des otages et la fin de la guerre : « Le mot bonheur est trop lourd pour nous. Mais on peut se réjouir pour les autres parents. Voir un père serrer son fils dans ses bras, c’est immense. Il y aura toujours une douleur, avant et après. »

« Achevez la mission pour laquelle ils se sont battus »

Le major de réserve Avraham Azoulay z’’l, du village de Yitzhar, est tombé en juillet 2025, après avoir repoussé des terroristes qui tentaient de le kidnapper près de Khan Younès.
Sa veuve, Ruth Azoulay, émue aux larmes devant les images des otages libérés, exprime à la fois sa fierté et son manque : « Je sais ce que c’est que le manque, la nostalgie. Je suis bouleversée de savoir que d’autres familles vont bientôt serrer dans leurs bras leurs êtres chers revenus du monde des morts. C’est un miracle. Mais il faut aussi parler de ceux qui ne reviendront pas. »

Elle poursuit :« Une partie de leur mission est accomplie, l’autre reste en suspens. Avraham voulait faire partie de l’histoire du peuple d’Israël. Il a choisi de se battre, d’en finir avec Gaza. Il a renoncé à nos premiers mois de mariage parce que le pays avait besoin de lui. »

Et de conclure : « Nos bien-aimés sont morts pour que les otages reviennent. Ils le referaient sans hésiter, et nous sommes fiers d’eux. Mais ce n’était pas que pour ça : il faut terminer la mission pour laquelle ils se sont battus. Que cette joie ne nous fasse pas oublier de purifier Gaza, c’est pour cela qu’ils sont morts. »

« Des jours de joie mêlés aux noms de ceux qui ne reviendront pas »

Yael Elboïm, mère du sergent Sharia Elboïm z’’l, tombé en novembre 2024 lors de combats au sud du Liban, a exprimé sa douleur dans un message poignant : « Ce sont des jours d’attente, des jours d’espérance pour le retour de tous les otages, emplis d’élévation et de joie - des jours de bonheur enveloppés des noms de ceux qui ont donné leur vie et ne reviendront pas. » Elle ajoute :« Je salue tous ceux qui se sont battus avec bravoure, ceux qui sont revenus dans leur corps, mais pas forcément dans leur âme, et ceux qui ne sont plus. Je salue mes fils, mes héros, et mon bien-aimé Sharia, tombé courageusement au Liban. Ces jours nous sont offerts grâce à eux. »

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