L’Allemagne a conclu un contrat de près de deux milliards d’euros avec la société israélienne Rafael Advanced Defense Systems pour l’acquisition de missiles antichars « Spike ». Une transaction d’ampleur exceptionnelle, conclue malgré l’embargo partiel sur les ventes d’armes à Israël décidé cet été par le chancelier Friedrich Merz, après la décision controversée du cabinet israélien d’occuper Gaza.
L’accord passera par la coentreprise EuroSpike, basée en Allemagne et détenue à 40 % par Rheinmetall, 40 % par Diehl Defense et 20 % par Rafael. Un montage qui permet de contourner les restrictions politiques, puisque la production des missiles se fera intégralement sur le sol allemand. EuroSpike fabrique déjà et distribue les missiles Spike à travers l’Europe ; cette commande sera la plus importante jamais passée par la Bundeswehr pour ce type d’armement.
Le Spike est aujourd’hui l’un des missiles antichars les plus vendus au monde : Rafael en a exporté vers plus de quarante pays, dont la moitié sont membres de l’OTAN. Sa simplicité d’utilisation, sa polyvalence et sa précision en font une référence dans la catégorie. Pour Israël, ce contrat arrive à un moment crucial, alors que plusieurs États européens, comme l’Espagne, ont récemment gelé ou annulé des commandes avec l’industrie israélienne de défense en raison de la guerre à Gaza.
L’Allemagne demeure le deuxième fournisseur d’armes d’Israël après les États-Unis, mais aussi un client stratégique des technologies israéliennes. Avant la guerre du 7 octobre, Berlin avait déjà signé un accord historique de quatorze milliards de shekels (environ 3,5 milliards d’euros) pour l’achat du système antimissiles Arrow 3, développé par l’Industrie aérospatiale israélienne (IAI). La livraison des premiers missiles est prévue d’ici la fin de l’année, et Berlin envisage déjà de s’équiper de la future génération Arrow 4, encore en développement.
En parallèle, l’IAI poursuit la modernisation de son propre missile antichar, le Lahat, rebaptisé Alpha Lahat, capable d’atteindre des cibles à plus de vingt kilomètres, soit deux fois la portée de son prédécesseur. Ce missile peut frapper sans ligne de vue directe et se guide par laser, un atout dans les environnements saturés de brouillage GPS.
Cette transaction, conclue dans un contexte diplomatique tendu, illustre la résilience du partenariat stratégique germano-israélien. Berlin affirme son besoin d’équipements de défense modernes, tout en ménageant l’opinion publique européenne. Pour Rafael, c’est un signal fort : malgré les pressions politiques, l’industrie israélienne reste incontournable dans le secteur de la défense européenne.