Les premières tractations autour d’un rapprochement militaire américano-marocain remontent à l’ouverture diplomatique de 2020. La montée en puissance militaire de l’Algérie — illustrée par ses achats russes — a renforcé la détermination de Rabat à acquérir des capacités de dissuasion modernes. Le F-35 offre, malgré une moindre capacité de charge utile que certains Sukhoï, un avantage décisif en matière de capteurs, de frappes hors-de-vue et d’intégration réseau : des qualités devenues vitales dans les conflits contemporains.
Toute vente d’armement sensible dans la région se heurte à la clause protégeant l’« adantage qualitatif israélien » — un principe défendu de longue date par Washington. Les médias spécialisés et analystes rapportent que Jérusalem ne s’oppose pas à l’opération et pourrait même apporter une coopération technique limitée, notamment sur des volets de maintien en condition opérationnelle et de systèmes de renseignement dérivés d’industries israéliennes. Cet aval, même s’il reste discret, facilite considérablement l’acceptation politique du dossier au Congrès américain.
Les collaborations entre groupes américains, israéliens et marocains ne sont pas que rhétoriques : des accords et partenariats existent déjà dans le domaine des capteurs, des conversions d’avions civils en plateformes ISR -intelligence, surveillance, reconnaissance-) et des ventes de satellites légers. Des entreprises liées à l’industrie aérospatiale israélienne ont fourni à Rabat des solutions — y compris des systèmes de surveillance — qui rapprochent les armées des deux pays sur le plan opérationnel. Ces connexions rendent la chaîne logistique et technique plus fluide si la vente des F-35 se confirme.
Face aux débats internes et aux manifestations parfois anti-israéliennes, Rabat a adopté ce que plusieurs observateurs décrivent comme un « calme industriel » : une retenue publique qui s’explique par son intérêt stratégique à ne pas compromettre une acquisition majeure auprès des États-Unis. Autrement dit, l’arme la plus silencieuse dans cette histoire reste le portefeuille.
Reste la phase la plus sensible : l’approbation par le Congrès américain. Les ventes de F-35 à des pays non-israéliens soulèvent systématiquement des débats sur la préservation de l’avantage qualitatif d’Israël et sur la diffusion de technologies sensibles. Le soutien — même implicite — de Jérusalem pèse donc lourd dans la balance. Sans lui, l’affaire aurait plus de chances d’atterrir au tiroir-bureau du législatif.
La possible vente des F-35 au Maroc est un cas d’école : transaction militaire, mais aussi levier diplomatique, industriel et économique. Israël y joue un rôle d’arbitre technologique discret, qui peut débloquer ou freiner l’accord selon ses intérêts stratégiques. Pour Rabat, l’achat vise à rétablir un rapport de forces face à Alger ; pour Washington, c’est une extension de son influence en Afrique du Nord. Et pour les industriels — israéliens et américains —, ce sont des contrats, des parts de marché et des chaînes d’intégration qu’on ne néglige pas.