Après 903 jours d'un calvaire inimaginable, Elizabeth Tsurkov, doctorante à l'université de Princeton et détentrice des nationalités israélienne et russe, sort du silence. Libérée en septembre dernier, la chercheuse de 38 ans a livré un témoignage glaçant, détaillant les tortures extrêmes et les horreurs subies aux mains des Brigades du Hezbollah, une milice chiite irakienne soutenue par l'Iran.
Les faits remontent à mars 2023. Alors qu'elle quittait un café du centre de Bagdad, Tsurkov a été enlevée en pleine rue. Elle décrit l'interception violente par un SUV noir. Des hommes l'ont forcée à monter à l'arrière du véhicule, où les agressions ont immédiatement commencé. « Ils ont commencé à me tordre le petit doigt, ils ont failli le casser », a-t-elle raconté. « J'ai compris que ça ne servait à rien de résister. »
Battue jusqu'à perdre connaissance
Les premières heures ont basculé dans les coups et les agressions sexuelles, marquant le début d'une captivité qui allait durer plus de deux ans et demi.
Les premiers mois de détention se sont révélés être les plus brutaux. Tsurkov décrit des actes de torture. Elle raconte avoir été ligotée, suspendue au plafond et battue jusqu'à ce qu'elle perde connaissance. Ses tortionnaires lui ont infligé des décharges électriques et l'ont forcée à prendre des positions qui lui causaient des douleurs atroces au dos et aux épaules. « Quand je perdais connaissance, ils me jetaient de l'eau au visage pour me réveiller et pouvoir continuer à me torturer. »
Dans son interview, réalisée dans une position allongée en raison de la douleur persistante, elle a confié : « Ils m'ont fouettée sur tout le corps. Ils se servaient de moi comme d'un punching-ball. »
Un mois après son enlèvement, la situation s'est intensifiée. La découverte de preuves de son identité israélienne sur son téléphone a conduit ses ravisseurs à l'accuser d'espionnage – une accusation qu'elle et les autorités israéliennes nient ferment. Suite à son refus "d'avouer", elle a été de nouveau pendue et torturée. « Voilà pourquoi il me manque une dent », a-t-elle déclaré, montrant la marque de la violence dans sa bouche.
L'un des moments les plus traumatisants fut la menace de viol. Un de ses geôliers, surnommé « le Colonel », décrit comme « très pervers et obsédé par le sexe », l'a menacée après avoir touché un tatouage sur sa cuisse. Bien que les interrogateurs aient réitéré les menaces de viol, ils ne sont jamais passés à l'acte, a-t-elle précisé.
Pour échapper à la torture incessante, Elizabeth Tsurkov a eu recours à une stratégie de survie : fabriquer de « faux aveux » crédibles, prenant soin qu'ils n'incriminent pas d'Irakiens. Sa première tentative, où elle a affirmé avoir organisé des manifestations antigouvernementales avec un journaliste français, a fonctionné. Ses geôliers l'ont crue et l'ont faite descendre du plafond où elle était suspendue.
Isolement total malgré des conditions améliorées
En août 2023, la situation de la doctorante a connu un « miracle » : elle a été transférée vers un autre lieu. Ses nouveaux geôliers ont cessé de la torturer, lui fournissant même une meilleure nourriture, des livres, une télévision et un thérapeute. En juin 2024, sa cellule a été rénovée avec un accès à une cuisine et une salle de bains.
Cependant, l'isolement est resté total. Pendant plus de deux ans, elle a été détenue dans une cellule sans fenêtre. « Je n’ai jamais vu le soleil », a-t-elle dit.
Elizabeth Tsurkov affirme avoir pris la décision de partager son histoire pour « donner une voix aux Irakiens torturés par les bataillons du Hezbollah ». Elle dit ne devoir sa libération "qu'à la persévérance des Etats-Unis"