Le Parlement israélien a adopté lundi soir un projet de loi controversé élargissant les compétences des tribunaux religieux en matière de pension alimentaire pour enfants. Le texte a été approuvé par 53 voix contre 38.
Cette mesure gouvernementale, valable pour une période test de deux ans, permettra aux tribunaux rabbiniques et ceux de la charia de statuer sur les pensions alimentaires des enfants de parents divorcés, même sans l'accord des deux époux. Jusqu'à présent, ces juridictions ne pouvaient intervenir qu'en cas de consentement mutuel.
La question de la compétence des tribunaux rabbiniques et civils sur les pensions alimentaires divise depuis des années. Si la loi prévoit que tribunaux de la famille et tribunaux religieux peuvent tous deux traiter les litiges liés au divorce, la Cour suprême avait tranché il y a plus de cinquante ans en faveur des juridictions civiles pour les questions de pension alimentaire.
En février dernier, la Haute Cour avait réaffirmé cette position, estimant que les tribunaux rabbiniques n'avaient pas compétence contraignante sur les pensions alimentaires lorsque celles-ci sont directement liées à une procédure de divorce.
La nouvelle loi modifie radicalement cette situation : le tribunal rabbinique pourra désormais se prononcer sur la pension alimentaire dès lors qu'il est saisi en premier, indépendamment de l'opposition éventuelle de l'un des conjoints. Le mécanisme devient similaire à celui des procédures de divorce, où le premier tribunal saisi – religieux ou civil – conserve la compétence.
Parallèlement à ce processus législatif, le président du Tribunal rabbinique a mis en place une commission chargée d'examiner la question des pensions alimentaires. Cette instance, composée uniquement de religieux, exclut tout professionnel comme les travailleurs sociaux, économistes ou juristes.
Simcha Rothman, président de la Commission constitutionnelle de la Knesset, a déclaré vouloir "clarifier la situation" en l'absence de cadre légal sur le calcul des pensions. Son objectif : inscrire les conclusions du tribunal rabbinique dans le droit civil israélien, une démarche sans précédent puisque les règles halakhiques n'ont jamais été transposées dans la législation civile du pays.
L'adoption de cette loi s'inscrit dans une stratégie gouvernementale d'ampleur visant à accroître les prérogatives des tribunaux rabbiniques. Un autre projet de loi, adopté en première lecture en mars dernier, autoriserait ces juridictions à statuer sur des litiges civils variés – baux immobiliers, transactions foncières, droit du travail – si les deux parties y consentent, selon un mécanisme proche de l'arbitrage.
Ce type d'arbitrage était possible jusqu'en 2006, année où la Cour suprême y avait mis fin. Depuis vingt ans, plusieurs tentatives de rétablissement ont échoué, même des députés de droite ayant reconnu les problèmes posés par cette pratique, notamment les déséquilibres de pouvoir susceptibles d'entacher le libre consentement des parties.