Moyen-Orient

« Le pacte géant États-Unis–Arabie saoudite de 557 milliards $ rebat les cartes au Moyen-Orient »

L’accord colossal annoncé entre Washington et Riyad ouvre une nouvelle ère stratégique. Privé d’enrichissement nucléaire mais riche en coopération économique et technologique, ce deal pourrait redessiner les équilibres régionaux – et influencer l’avenir des Accords d’Abraham ainsi que la place d’Israel dans l’architecture de sécurité voulue par Washington.

2 minutes
20 novembre 2025

ParDelphine Miller

« Le pacte géant États-Unis–Arabie saoudite de 557 milliards $ rebat les cartes au Moyen-Orient »
Pacte géant entre États-Unis et Arabie saoudite (Unsplash)

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L’annonce a fait l’effet d’un séisme diplomatique : la télévision d’État saoudienne a confirmé que la valeur du méga-deal conclu avec les États-Unis atteignait 557 milliards de dollars, citant le ministre saoudien de l’Investissement Khalid al-Falih.

Un point sensible a immédiatement attiré l’attention : le volet nucléaire. Le secrétaire américain à l’Énergie, Chris Wright, a affirmé sur Fox News que l’accord n’inclurait pas l’enrichissement d’uranium et porterait uniquement sur l’énergie civile, « sûre, fiable et peu coûteuse ».

Mais au-delà de l’énergie, c’est l’équilibre diplomatique du Moyen-Orient qui pourrait être durablement affecté. Depuis plusieurs années, les négociations entre Riyad et Washington étaient intimement liées au dossier de la normalisation avec Israel dans le cadre élargi des Accords d’Abraham. Or, l’administration Trump a désormais déconnecté le dossier nucléaire saoudien de la question de la reconnaissance d’Israel, un élément qui bouleverse le schéma traditionnel des discussions dans la région.

Certains analystes voient dans ce tournant un changement majeur de paradigme :
Hussein Ibish, chercheur au Middle East Institute, estime que Riyad « se positionne comme un acteur autonome, moins dépendant des mécanismes multilatéraux tels que les Accords d’Abraham ».
Yoel Guzansky, expert saoudien au Institute for National Security Studies (INSS) à Tel-Aviv, souligne que « ce méga-deal renforce la stature internationale de MBS et pourrait réduire le levier diplomatique d’Israel vis-à-vis de Washington » (source : INSS analyses).
Kristin Smith Diwan, du Arab Gulf States Institute in Washington (AGSIW), note que « la coopération économique massive entre Riyad et Washington replace les enjeux géo-économiques au centre de la stratégie régionale ».

Pour Israel, ce repositionnement de Riyad est ambivalent :
D’un côté, certains observateurs considèrent que la solidité de l’alliance États-Unis–Israel demeure un rempart essentiel. De l’autre, le fait que Washington avance sur un accord historique sans y associer explicitement Israel pourrait affaiblir l’influence israélienne dans des arbitrages stratégiques décisifs.

En toile de fond, les Accords d’Abraham — déjà fragilisés par les crises récentes — pourraient entrer dans une phase de recomposition. Comme le rappelle Carnegie Middle East Center, les dynamiques régionales actuelles se détachent de plus en plus des schémas nés en 2020 pour se reconfigurer autour de blocs géo-économiques et de partenariats bilatéraux renforcés.

Dans ce contexte, le pacte de 557 milliards $ apparaît comme l’un des tournants diplomatiques majeurs de l’année — un acte qui redéfinit les priorités de Washington, accélère la mutation saoudienne et redistribue les cartes pour les puissances régionales, Israel compris.

 

 

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