Selon des responsables israéliens, ces tirs – annoncés à l’avance – visent à signifier que la République islamique n’accepte pas le nouvel équilibre de puissance que tentent d’imposer Israël et Washington après la guerre de juin dernier. Avant ce conflit, Téhéran avait déjà multiplié les lancements, parfois seul, parfois en coopération avec Moscou. Si, depuis la guerre des 12 jours, au mois de juin, le programme nucléaire iranien est largement dégradé et n’a pas connu de progrès significatifs, ces lancements relancent néanmoins les interrogations.
Les trois satellites lancés par l’Iran sont officiellement destinés à des missions civiles d’observation de la Terre. Paya, le plus lourd d’entre eux -environ 150 kilos-, doit fournir des images utilisées pour l’agriculture, la gestion de l’eau, la surveillance environnementale et l’évaluation des catastrophes naturelles. Zafar-2 est conçu pour des missions de cartographie et de suivi du territoire, tandis que Kowsar-1.5 combine des capacités d’imagerie et de technologies connectées, notamment pour le suivi et l’optimisation des exploitations agricoles.
Trois axes de préoccupation cependant ressortent : Double usage balistique : même si le nucléaire est en sommeil, les progrès liés aux lanceurs spatiaux pourraient raccourcir le délai vers des capacités de missiles balistiques intercontinentaux ; Pression conventionnelle : après plusieurs salves massives de missiles balistiques contre Israël entre avril 2024 et juin 2025, l’amélioration des vecteurs longue portée élargirait la menace au-delà du Moyen-Orient ; Renseignement spatial : certains satellites ont une vocation d’observation. En coopération avec la Russie, l’Iran pourrait renforcer ses capacités de surveillance, réduisant l’avantage informationnel d’Israël. « En dépit des sanctions et des pressions internationales, l’Iran poursuit le développement de ses capacités spatiales », s'est félicité l’ambassadeur d’Iran en Russie, Kazem Jalali.
Les précédents lancements conjoints, dont le satellite Khayyam en 2022 via une fusée Soyouz, avaient déjà suscité des inquiétudes en Israël et en Occident. Les services américains avaient alors averti que les lanceurs spatiaux iraniens accélèrent le chemin vers un ICBM. Des responsables israéliens craignent aussi que ces capacités entravent les opérations de renseignement visant à contenir les ambitions militaires de Téhéran.
Certains experts appellent toutefois à la prudence. Le général de réserve Isaac Ben-Israel, figure du programme spatial israélien, rappelait déjà que des images commerciales très haute résolution sont disponibles sur le marché à coût limité, relativisant l’impact stratégique immédiat.
En résumé : plus qu’un bond technologique décisif, ce lancement apparaît comme un geste politique calibré, destiné à peser sur l’agenda diplomatique à l’approche du tête-à-tête Netanyahu–Trump, tout en maintenant la pression sur le terrain balistique et du renseignement.