Israël, leader régional des énergies renouvelables, envisage pourtant de se doter de sa première centrale nucléaire ! La commission régionale de planification et de construction doit examiner la semaine prochaine le projet de centrale nucléaire dans la région de Shivta, dans le Néguev. Une décision qui soulève une vive opposition locale, notamment de la part du conseil régional de Ramat HaNegev et d'autres autorités du sud du pays.
Le ministère de l'Énergie a rejeté plusieurs autres emplacements envisagés, en raison de leur proximité avec Gaza, avec un aéroport militaire ou avec des zones densément peuplées. Pourtant, de nombreuses zones d’ombre entourent encore ce projet : quel pays construirait la centrale, alors qu’Israël n’est pas signataire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ? D’où viendrait le combustible nucléaire ? Et surtout, comment refroidir un réacteur dans le désert et y acheminer l’eau nécessaire ?
Le site de Shivta a été recommandé après élimination d'autres options. Celui de Bessor, trop proche d’une base aérienne, a été écarté selon les critères de l’Agence internationale de l’énergie atomique. La zone de Nitzanim a également été rejetée, en raison du risque environnemental en cas d’attaque militaire et de doutes géologiques remettant en question sa viabilité économique, malgré sa proximité avec la mer qui aurait permis un refroidissement plus aisé. Le site de Beit Guvrin, quant à lui, a été exclu pour des raisons démographiques et militaires, puisqu’il se trouve dans une zone essentielle d'entraînement de Tsahal. Des arguments qui laissent dubitatifs, car l’implantation de Shivta n’est pas totalement isolée : elle est entourée des localités de Ashalim, Talalim, Mashabei Sadeh, du village bédouin de Bir Hadaj, du kibboutz Revivim et du village de Retamim.
Le ministère de l'Énergie justifie sa recommandation par l’éloignement du site de Shivta des failles géologiques et de zones sismiques actives. Il affirme que les technologies modernes en développement offrent un haut niveau de sécurité. Pourtant, les doutes persistent. Aucun pays n’est actuellement en mesure de vendre un réacteur nucléaire à Israël en raison de son statut vis-à-vis du TNP. Très peu d’États sont capables de construire de telles infrastructures aujourd’hui. Les États-Unis n’ont pas bâti de centrale depuis des années, et seule la France continue activement dans ce domaine. L’approvisionnement en combustible impliquerait nécessairement une dépendance à un pays tiers, ce qui remettrait en question l’indépendance énergétique israélienne. De plus, la nécessité de refroidir le réacteur imposerait des infrastructures massives pour acheminer l’eau jusque dans le désert.
La directrice du conseil régional de Ramat HaNegev, Hila Kaplan, a exprimé une opposition catégorique. D’autres élus locaux, comme le maire d’Ofakim Itzik Danino, la présidente du conseil régional d’Eshkol Michal Uziel et le président du conseil régional de Merhavim Shai Hajaj, ont également adressé une lettre à la commission régionale pour exprimer leur refus : « Notre région porte encore les stigmates du 7 octobre. Alors que nous tentons de reconstruire, il est inconcevable d’introduire un risque supplémentaire pour la population. »
L’ingénieur du conseil régional de Ramat HaNegev, Oren Peretz, dénonce une décision prise sans concertation locale, fondée sur une étude de sites datant de 40 ans : « Le site proposé expose les localités à proximité à des risques majeurs en cas de défaillance, et transformerait cette zone, qui accueille actuellement des évacués en temps de guerre, en cible stratégique. Dans un contexte de développement massif des énergies solaires, pourquoi introduire une technologie coûteuse, risquée, et qui ne fait pas consensus ? »