Vie politique

La Cour suprême oblige le ministre de la Justice à procéder à la nomination du président de la Cour suprême

5 minutes
9 septembre 2024

ParIsraJ

La Cour suprême oblige le ministre de la Justice à procéder à la nomination du président de la Cour suprême
Photo by Yonatan Sindel/Flash90

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Depuis le 16 octobre dernier, la Cour suprême n’a pas de président fixe mais un président par intérim, le juge Uzi Fogelman.
Cette situation est liée au bras de fer entre le ministre de la Justice, Yarvi Levin, et les juges de la Cour suprême mais aussi le barreau d’Israël qui refusent de voir changer la méthode de nomination du président de la Cour.

Selon une règle non écrite, la désignation du président de la Cour suprême se fait suivant la règle de l’ancienneté. Lorsque le président en exercice part à la retraite à l’âge de 70 ans, c’est le juge qui possède le plus d’ancienneté qui prend sa place.

Ainsi, le juge Itshak Amit aurait dû remplacer Esther Hayot à son départ à la retraite, il y a près d’un an.

Mais le ministre a refusé de convoquer la commission de nomination des juges qui devait entériner de manière formelle cette désignation, puisqu’en plein débats autour de la réforme judiciaire, Levin espérait pouvoir changer la méthode de nomination des juges afin qu’elle soit plus équilibrée. Levin souhait un équilibre entre les forces politiques en présence en retirant le droit de veto des juges au sein de la commission.

Depuis près d’un an donc, la commission n’a pas été convoquée, surtout qu’entre temps la guerre a éclaté.

A cela s’ajoute que fin août 2023, le juge Yossef Elron a annoncé à Hayot et à Levin, qu’il se présentait au poste de président de la Cour suprême. C’est la première fois depuis la création de l’Etat qu’un tel scénario se produit puisque jusqu’alors la règle de l’ancienneté était acceptée comme allant de soi. Cette candidature rebattait les cartes.

Le juge Elron a été nommé juge à la Cour suprême en 2017. Il était le candidat de la ministre de la Justice de l’époque, Ayelet Shaked. L’ancien président de la Cour suprême, le juge Aharon Barak, avait critiqué cette nomination en avançant des arguments qui résonnent encore plus fort aujourd’hui: ”Il faut comprendre que la Cour suprême est une famille, même s’il peut y avoir des opinions différentes. Pour le bien de l’Etat, il faut un tribunal cohérent, au sein duquel les rapports sont comme dans une famille, avec les différences d’opinion. On ne peut pas faire entrer dans le système une personne qui n’appartient pas à la famille”. Etait-ce parce qu’Elron est d’origine irakienne?


Le juge Elron dérange donc, parce qu’il ne fait pas partie de la ”clique” qui siège habituellement à la Cour suprême et sa candidature à la présidence jette un pavé dans la mare.


Le juge Fogelman part à la retraite au mois d’octobre prochain et il faut donc parvenir à trouver un arrangement pour qu’un président soit définitivement nommé à la tête de la Cour suprême.

Il y a deux semaines, Levin a proposé un compromis aux juges de la Cour suprême afin de débloquer la situation, compromis rejeté immédiatement par les juges.

Hier (dimanche), la Cour suprême a rendu son verdict concernant le recours déposé par le ''mouvement pour la qualité du pouvoir'' et a exigé du ministre qu'il procède à la nomination d'un président dans les 14 jours.

Si le ministre se plie à cette exigence, il devra nommer Itshak Amit président de la Cour suprême. Levin a déjà indiqué qu'il ne pourrait pas travailler avec lui puisqu'il aurait été nommé sur la base d'un verdict illégal. En effet, le ministre souligne que les juges ont rendu leur décision alors qu'ils se trouvaient en situation flagrante de conflit d'intérêt puisque les mêmes qui ont prononcé le jugement sont directement concernés par cette nomination. Par ailleurs, le pouvoir de convoquer la commission de nomination est à la discrétion du ministre, selon la loi.

Levin voudrait qu'un compromis soit trouvé afin de permettre l'entrée à la Cour suprême de juges plus ''conservateurs'' et de mettre un terme à la nomination selon l'ancienneté. Mais il se heurte au refus catégorique des juges de la Cour suprême ce qui crée une situation de blocage.

Le ministre de la Justice s'est insurgé: ''Ce verdict est dans la droite ligne des nominations irrégulières du système judiciaire comme nous l'avons vu avec la nomination du conseiller juridique du gouvernement. C'est exactement pour cela que j'ai agi dès la mise en place de ce gouvernement pour changer la situation. Lorsque la guerre a éclaté, j'ai décidé de stopper le travail législatif et de m'occuper uniquement de sujets sur lesquels existait un large consensus. Mais au lieu de se joindre à cette décision, le système judiciaire en a profité pour annuler une loi fondamentale et pour intervenir dans des sujets sécuritaires en se souciant des conditions de détention des terroristes.

Pour l'heure, Yariv Levin laisse entendre qu'il ne se conformera pas à la décision de la Cour suprême qu'il considère illégale. Les observateurs estiment cependant qu'après quelques semaines de lutte, il sera contraint de plier et de nommer Itshak Amit à la tête de la Cour suprême. Affaire à suivre...
Boaron blue