Un an et neuf mois après le massacre du 7 octobre 2023, le rapport complet du "Projet Dina" dévoile un tableau saisissant de la brutalité orchestrée par le Hamas. Publié mardi, ce document de 84 pages établit de manière irréfutable que les violences sexuelles n'ont pas été des actes isolés mais constituent une "arme tactique" délibérément planifiée.
"Nous cherchons à clarifier les faits historiques : le Hamas a utilisé la violence sexuelle comme arme tactique pendant la guerre", écrivent les auteurs du rapport, qui rassemble des dizaines de témoignages et preuves documentaires.
Six lieux, des centaines de victimes
L'enquête révèle que des violences sexuelles ont été perpétrées dans au moins six endroits différents : le festival Nova, l'autoroute 232, la base de Nahal Oz et les kibboutzim de Reim, Nir Oz et Kfar Gaza. Le rapport s'appuie sur les témoignages d'une survivante de viol du festival Nova, de 15 survivants de captivité, de 17 témoins oculaires, de 27 membres d'équipes de secours, ainsi que sur de nombreux documents visuels. Figure notamment dans le rapport le témoignage de Ron Prager, survivant du festival Nova, qui a entendu "des filles crier dans les buissons : 'Je suis en train de me faire violer, aidez-moi'", tandis que lui et d'autres se cachaient, impuissants.
Les auteurs soulignent que "la grande majorité des victimes d'agressions sexuelles figuraient parmi les 1 166 victimes réduites au silence à jamais". De nombreuses survivantes, ajoutent-ils, "sont peut-être trop traumatisées pour nous raconter leur expérience".
Des schémas répétitifs révélateurs
Le rapport identifie "des schémas clairs" dans la perpétration des violences : victimes retrouvées partiellement ou totalement nues, mains attachées parfois à des arbres ou des poteaux, traces de viols collectifs suivis d'exécutions, et violences génitales extrêmes.
Les équipes de secours arrivées sur les lieux décrivent des scènes identiques : "Des dizaines de corps de femmes, nus ou partiellement nus jusqu'à la taille, dont beaucoup saignaient des parties génitales suite à des blessures par balle." Le rapport recense au moins trois cas où des objets ont été insérés dans les parties génitales des victimes avant leur assassinat.
La violence sexuelle en captivité
Le document établit que "les violences sexuelles se sont poursuivies en captivité". Les personnes enlevées libérées ont signalé des cas de nudité forcée, de harcèlement sexuel physique et verbal, d'agression sexuelle et de menaces de mariage forcé.
Keith Siegel, survivant de captivité, a témoigné dans l'émission américaine "60 Minutes" que les terroristes rasaient les cheveux des hommes, y compris leurs parties intimes, une action "visant à priver la victime de son identité sexuelle et de genre".
Le rapport cite le témoignage d'Amit Soussana, qui a raconté à son retour de captivité avoir été agressée sexuellement sous la menace d'une arme, battue et enchaînée. "Il s'est approché de moi, a pointé son arme vers mon front et m'a frappée. Il m'a traînée dans la chambre des enfants, puis a pointé l'arme sur moi et m'a forcée à commettre un acte sexuel sur lui", a-t-elle déclaré au New York Times.
Maya Regev, autre survivante, a décrit aux ambassadeurs de l'ONU comment "les terroristes du Hamas m'ont arraché mes vêtements. Ils m'ont volé mon identité et mon nom."
Un bilan accablant
Le rapport final recense au moins 16 cas d'agressions sexuelles graves, incluant une tentative de viol au festival Nova et 15 agressions documentées en captivité. Il fait état d'au moins quatre viols collectifs et trois cas de violences génitales graves, tout en précisant que ces chiffres pourraient être sous-estimés.
Les auteurs du rapport - la professeure Ruth Halperin-Kadri, la juge à la retraite Nava Ben-Or et la colonel Sharon Zaggi-Pinhas - insistent sur le caractère systématique de ces violences. "La violence sexuelle en temps de conflit est une arme. Elle n'est pas aléatoire, elle ne vise pas un seul individu et elle n'est pas commise sans l'aval d'une autorité supérieure", déclare Ruth Halperin-Kadri.
Un cadre juridique pour les poursuites
L'objectif du rapport est d'établir un cadre juridique permettant de poursuivre les terroristes du Hamas pour ces crimes. Les auteurs estiment qu'il existe un cadre légal pour engager la responsabilité pénale de tous les participants à l'attaque, même ceux qui n'ont pas directement participé aux viols.
Ce document rejoint d'autres rapports internationaux, notamment celui de l'envoyée de l'ONU Pramila Patten et les preuves ayant servi aux mandats d'arrêt de la Cour pénale internationale contre les dirigeants du Hamas.
Le rapport du "Projet Dina", qui a été remis à l'épouse du président de l'Etat, Michal Herzog, constitue désormais une pièce maîtresse dans la documentation des crimes du 7 octobre, établissant que les violences sexuelles n'étaient pas des débordements mais une stratégie délibérée de terreur et d'humiliation.