La province druze de Soueïda, dans le sud de la Syrie, s’est embrasée ces derniers jours. Des hommes armés ont attaqué plusieurs villages, tué des civils, humilié des figures spirituelles et arrêté des dizaines d’habitants. Parmi les victimes : le cheikh Marahg, 80 ans, assassiné après avoir été publiquement rabaissé. Ces violences ciblées ne relèvent pas d’un simple conflit local : elles s’inscrivent dans une lutte stratégique, au moment où un fragile espoir de désescalade diplomatique semblait poindre entre Israël, la Syrie et les États-Unis.
Une attaque après la visite américaine
Quelques jours plus tôt, l’envoyé spécial américain Tom Barrack s’était rendu à Damas pour évoquer une initiative régionale visant à stabiliser le sud syrien. Des diplomates arabes et occidentaux ont évoqué un accord discret avec la participation d’Israël, visant à freiner l’influence iranienne et ramener le calme à la frontière.
Mais à peine Barrack reparti, l’offensive a été lancée. Certains y voient un lien direct : soit le régime syrien cherche à reprendre le contrôle de cette province longtemps agitée, soit des milices pro-iraniennes ont voulu torpiller tout rapprochement régional.
Une zone tampon cruciale pour Israël
Le Jebel al-Druze, cœur de la province de Soueïda, est un verrou stratégique proche du Golan. Les Druzes syriens y maintiennent une autonomie relative, ni hostiles à Israël ni soumis à Damas ou à Téhéran. Cette neutralité en a fait une zone tampon empêchant les milices chiites, le Hezbollah ou l’Iran de s’approcher de la frontière israélienne.
C’est ce statut que l’attaque semble vouloir briser, en affaiblissant les structures locales druzes et en envoyant un message à Jérusalem et Washington. Plusieurs Druzes israéliens ont même franchi la frontière pour secourir leurs proches, déclenchant une réponse ferme de Tsahal.
Qui est derrière l’attaque ?
Les auteurs ne sont pas identifiés officiellement. Des témoins accusent le renseignement militaire syrien, tandis que des observateurs signalent la présence de milices chiites affiliées au Hezbollah ou aux Gardiens de la Révolution. L’attaque pourrait avoir été menée par des milices iraniennes avec l’aval de Damas, ou de manière autonome. Les motivations restent floues, mais elles s’inscrivent dans un contexte de fortes tensions régionales.
Un processus diplomatique suspendu
Pour Israël comme pour les États-Unis, deux scénarios sont possibles : soit Damas a orchestré l’attaque, signant son rejet de toute ouverture diplomatique et son alignement avec Téhéran ; soit le régime ne contrôle plus ses alliés, ce qui révélerait sa faiblesse. Dans les deux cas, cela compromet les espoirs de désescalade.
Le statut stabilisateur de la zone druze est fragilisé. Son avenir dépendra autant de la dynamique locale que des jeux régionaux toujours en cours. Rien n’est encore joué — ni pour le sud syrien, ni pour la diplomatie au Levant.