Culture

Un colloque exceptionnel à Jérusalem pour repenser l'identité juive/israélienne/hébraïque

« Nous avons besoin de nous rassembler pour ressentir et penser ensemble » : un colloque exceptionnel à Jérusalem pour repenser l'identité juive/israélienne/hébraïque deux ans après le 7 octobre.

5 minutes
3 octobre 2025

ParActu J

Un colloque exceptionnel à Jérusalem pour repenser l'identité juive/israélienne/hébraïque

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Le 29 octobre 2025, Jérusalem accueillera un événement d'envergure : le colloque « “Sous le signe de Sion”. MAKOM – Identité humaine, identité juive », organisé par l'Institut Schibboleth et le Centre Menahem Begin. Cette journée exceptionnelle réunira de prestigieux intervenants venus de France et d'Israël, parmi lesquels Pascal Bruckner, Philippe Val, Georges Bensoussan, Daniel Sibony, les anciens ambassadeurs Éric Danon et Daniel Saada, ou encore Céline Pina.

 

Un projet né du traumatisme collectif

« Nous avons tous été traumatisés par le 7 octobre », explique le professeur Michel Gad Wolkowicz, psychanalyste et organisateur du colloque. « Et ce traumatisme abyssal se prolonge avec cet antisémitisme absolument psychotique qui prend la forme de déchaînements pulsionnels et s’étend jusqu'aux grandes institutions. »

Pour le président de l'Institut Schibboleth, ce traumatisme collectif a fait « vaciller le sentiment d'identité » et révélé une profonde crise identitaire en Israël. « Il y avait probablement déjà une crise identitaire, qui a peut-être permis au 7 octobre de se dérouler », analyse-t-il prudemment. « Des conflits identitaires ont fait baisser la vigilance sur ce qui est essentiel, y compris chez nos politiques. […] Il est nécessaire, deux ans après, de se demander comment permettre un travail de deuil collectif et individuel face à ce traumatisme qui a révélé des clivages massifs désagrégeant le tissu national. »

Ce colloque est aussi et avant tout une rencontre : « Nous avons besoin de nous rassembler pour ressentir ensemble, penser ensemble, écouter d'autres personnes qui pensent différemment parce qu'ils ont une formation différente et qu’ils utilisent un langage différent. C’est ce qui nous permet de nous « réétrangéiser » par rapport à notre propre discipline et de questionner nos évidences quand on est trop spécialiste. » Cette rencontre interdisciplinaire autour des questions d'identité, d'appartenance, d’avenir, de l’antisémitisme, convoque ainsi des philosophes, des historiens, des penseurs juifs, des artistes, des écrivains, des journalistes, des psychanalystes, des linguistes, des diplomates…

 

L'identité comme question permanente

« Au fond, qu'est-ce qu'être juif ? C'est une question que chacun d'entre nous se pose tout le temps », souligne le professeur Wolkowicz, qui poursuit : « Et c'est peut-être cela, être juif : se poser cette question sur notre identité, sur ce qu'on va devenir. Ce singulièrement universel typiquement juif. » Et, faisant référence au thème choisi pour ce colloque, « Identité juive, identité humaine », titre emprunté au penseur Raphaël Draï, il ajoute : « L'identité est toujours un entre-deux, sous peine de se momifier. »

Le programme, organisé en sept sessions thématiques, abordera successivement « L'identité en question – comment “ça” fait peuple ? », « Judéité, appartenance, transmission », « Le trait identificatoire commun », « La reprise de l'Alliance et la modernité », « L'invention de la liberté », « L'antisionisme en miroir de l'éthique juive » et « Le travail de culture ». Parmi les interventions attendues : « De l'Autre au Quelqu'un : pour une sortie de l'identité juive abstraite », par Éric Danon ; « Tsahal, ultime bastion identitaire », par Raphaël Jerusalmy ; « L'hébreu est-il une langue sioniste ? », par Cyril Aslanov ; ou encore « La fin des Juifs de France ? », par Dov Maïmon et Didier Long.

 

« Nous devons nous rassembler afin de réfléchir effectivement sur qui nous sommes, ce que nous faisons là, quel travail de culture nous pouvons réaliser collectivement, pour nous interroger sur un trait identificatoire commun à reconstruire, Juifs, Hébreux, Israéliens, etc., qui permettrait à des identités singulières de se développer »

 

Repenser le sionisme comme « façon d'être »

Pour Wolkowicz, le sionisme représente bien plus qu'une idéologie politique : « Le sionisme est une façon d'être, de penser, de renouveler l'alliance de manière moderne, c'est-à-dire de lier la tradition et la création, de se réinventer, d'être exigeant sur un travail permettant de mériter effectivement cette terre. C'est ce qui construit un peuple et c’est quelque chose qui doit transcender les idéologies et les croyances totalisantes. C’est la raison pour laquelle j’ai intitulé ce colloque “Sous le signe de Sion”. » Et de citer cette formule saisissante prononcée par le père de Michaël Bar-Zvi, rescapé des camps d'extermination nazis : « Pour les Juifs, la guerre a commencé le 8 mai 1945. »

 

Un événement culturel complet

Le colloque s'ouvrira par le vernissage de l'exposition de Richard Kenigsman (voir entretien) le 28 octobre au soir, au Centre Begin à Jérusalem. Cet artiste mondialement reconnu « a fait des toiles tous les jours depuis le 7 octobre », explique Wolkowicz, « des toiles qui ne sont pas du pathos, qui sont vraiment un travail d'élaboration du traumatique, mais s'inspirant aussi de la pensée juive, de la philosophie, de la pensée et de l'histoire juives ».

La journée se clôturera par la projection en avant-première mondiale du film HaTIKVA – Du fleuve à la mer, d'Eden Levi Campana, documentaire qui suit « sur 700 jours un large panel de témoins » pour explorer « ce que c’est qu'être Juif après le 7 octobre » (voir encadré).

« Personne ne peut aujourd'hui prétendre avoir une vue d'ensemble des choses », conclut le professeur Wolkowicz. Son objectif : « refonder une société collective qui permette à chacun de s'étayer tout en développant des choix singuliers », loin des « refuges dans des appartenances de petits groupes totalisants ».

 

Infos pratiques

29 octobre, de 9h30 à 23h

Centre Menahem Begin, Jérusalem

Réservation obligatoire

Possibilité de réservation par téléphone : 02-5652020

Possibilité d’assister au colloque par Zoom (attention : la projection du film et la table ronde qui suivra ne seront pas retransmises par Zoom).

Toutes les informations sur ce lien : https://did.li/BeginSchibboleth29-10

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