Quatre caisses contenant du matériel radiofréquence de Swissto12, destinées à l’entreprise israélienne Elbit Systems — premier fabricant de drones dElles avaient quitté la Suisse sans licence d’exportation, en route vers Tel-Aviv. L’alerte donnée par le collectif d’investigation zurichois WAV, a conduit le gouvernement de Wallonie à demander une suspension immédiate du transfert.
Les quatre caisses saisies le 9 octobre au soir, dépourvues de tout marquage distinctif, sont désormais soumises à une expertise technique afin de déterminer si elles contiennent du matériel à double usage — civil et militaire.
« Quand on contourne la demande de licence d’armes, c’est une faute. La Wallonie ne laisse pas faire », a réagi le cabinet du ministre-président Adrien Dolimont, rappelant que depuis 2009, aucune licence d’exportation vers Israël n’est délivrée pour des produits susceptibles de renforcer ses capacités militaires.
Elbit Systems, géant israélien de la défense, fournit environ 75 % des drones utilisés par Israël, notamment à Gaza. Ses appareils, comme les Hermes 450 et 900, sont essentiels aux opérations aériennes et à la surveillance frontalière. Swissto12, de son côté, est connue pour ses antennes miniaturisées à haute performance, conçues pour l’aérospatiale et la défense. Ces antennes, produites par impression 3D puis métallisation, offrent une communication à très haute fréquence avec un encombrement minimal — une technologie recherchée par l’industrie militaire.
Ce n’est pas la première fois que la Belgique joue le rôle de plateforme de transit dans ce type d’affaire. En 2024, la société de transport FedEx avait déjà été mise en cause pour avoir convoyé, à trois reprises, du matériel Lockheed Martin vers Israël via Liège. La Région wallonne, qui interdit strictement toute exportation d’armement vers des pays en guerre, s’était alors portée partie civile.
Dans un contexte marqué par la mise en œuvre du plan Trump pour Gaza et la signature récente d’un cessez-le-feu historique entre Israël et le Hamas, l’incident embarrasse les chancelleries européennes.
La Suisse, signataire du Traité sur le commerce des armes, s’est engagée à empêcher tout détournement de technologies à usage militaire. Or, Swissto12 avait conclu en 2021 un partenariat officiel avec Elbit, supprimé discrètement de son site en mars 2024 — puis du site d’Elbit le 8 octobre 2025, après la révélation de l’affaire.
Face à la polémique, Swissto12 a indiqué qu’elle cesserait toute vente à des entités israéliennes, affirmant que ses produits étaient destinés à être intégrés dans des systèmes « réexportés vers des utilisateurs finaux étrangers ».
À Bruxelles comme à Berne, plusieurs députés écologistes et socialistes appellent désormais à renforcer les contrôles sur les exportations à double usage et à exiger des chaînes logistiques entièrement traçables.
En Belgique, la commission de la Défense pourrait bientôt auditionner des responsables de la Douane et du ministère de l’Économie sur ce que certains appellent les « failles du transit wallon » — une appellation pudique pour ce qui ressemble davantage à un boycott officieux d’Israël.