Israël

Passeports européens : la fin de l’âge d’or pour les Israéliens

Face à une demande record de double nationalité, plusieurs pays européens resserrent leurs critères de naturalisation. L’époque des procédures express semble révolue.

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2 novembre 2025

ParDelphine Miller

Passeports européens : la fin de l’âge d’or pour les Israéliens
Photo: Chaim Goldberg/FLASH90

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En Israël, la course au deuxième passeport est devenue un phénomène de société. Sur fond d’incertitudes politiques, de tensions sécuritaires et de flambée du coût de la vie, des milliers de familles ont entrepris de renouer avec leurs racines européennes pour décrocher une citoyenneté complémentaire. Mais cet élan collectif se heurte désormais à une fermeture progressive des guichets.

L’Allemagne, l’Italie, le Portugal, la Roumanie ou encore les États-Unis invoquent une hausse des abus et un « détournement des lois de réparation historique ». Yoav Stern, directeur d’un cabinet spécialisé dans les passeports allemands, confirme : « Depuis la guerre de Gaza en 2023, les demandes ont explosé. Mais aujourd’hui, les consulats freinent des quatre fers. »

Pendant près d’une décennie, les descendants de Juifs séfarades expulsés d’Espagne et du Portugal, ou de familles persécutées par le nazisme, pouvaient obtenir un passeport européen en quelques années seulement. Mais le vent a tourné. Depuis 2024, le Portugal et l’Espagne exigent des preuves généalogiques certifiées par les tribunaux ou par des communautés juives reconnues. L’Italie impose désormais une résidence effective sur le sol européen pour les demandes de citoyenneté “par le sang”.

Pour de nombreux Israéliens, ce passeport étranger n’est pas un symbole d’exil, mais de sécurité. « Ce n’est pas fuir Israël, c’est assurer l’avenir des enfants », explique Noga Ben-Ari, mère de trois enfants à Tel Aviv, en attente d’un passeport portugais. Le document européen est perçu comme un filet de sécurité face à un avenir incertain — un “plan B” plus qu’un départ.

Selon le Bureau central des statistiques, près de 160 000 Israéliens vivaient à l’étranger en 2025, un chiffre en hausse constante. Pour certains, comme Daniel Levy, ingénieur à Haïfa, la démarche revêt une signification intime : « Mes grands-parents ont été chassés d’Allemagne, et aujourd’hui je redemande leur nationalité. »

Mais l’Europe d’aujourd’hui ne se contente plus de la mémoire : elle réclame des preuves concrètes, des dossiers complets, des justifications solides. Ce resserrement révèle une évolution plus profonde du rapport des Israéliens à leur identité. Moins idéologique, plus pragmatique, cette génération cherche à s’ouvrir au monde tout en gardant les pieds sur sa terre.

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