Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne se pencheront la semaine prochaine sur une proposition visant à former près de 3 000 policiers palestiniens appelés à être déployés dans la bande de Gaza. Le projet, encore à un stade préliminaire, reflète la volonté de Bruxelles de peser davantage dans la discussion autour du « lendemain » du conflit. Une initiative qui intervient alors que les puissances occidentales cherchent à éviter deux scénarios jugés inacceptables : un retour du Hamas aux commandes du territoire ou une administration israélienne prolongée qui compliquerait tout cadre politique futur.
Depuis le début de la guerre, l’Union européenne peine à parler d’une seule voix. Entre États favorables à une ligne pro-israélienne, comme l’Allemagne ou la République tchèque, et ceux plaidant pour une reconnaissance accrue des aspirations palestiniennes, l’équilibre est fragile. L’idée fait écho à des programmes déjà conduits par l’UE et les États-Unis en Judée-Samarie dans les années 2000, où des forces de sécurité palestiniennes avaient été entraînées dans le cadre d’un renforcement de l’Autorité palestinienne.
Si l’objectif affiché est de permettre à des forces palestiniennes « modérées » d’assurer l’ordre à Gaza, plusieurs zones d’ombre demeurent : qui superviserait réellement ces policiers ? L’Autorité palestinienne ? L’UE via une mission civile ? Une coalition régionale ? ; Comment garantir leur légitimité sur le terrain ?
Gaza n’a pas été administrée par Ramallah depuis 2007. Leur présence pourrait être contestée. ; Le risque d’infiltration est-il maîtrisable ? Dans un territoire ravagé par 17 ans de contrôle du Hamas, la sécurité opérationnelle n’est pas acquise ; Le cadre politique existe-t-il vraiment ? Sans accord israélien et sans plan clair pour gouverner Gaza, toute force civile reste théorique.
En Israël, certains responsables politiques soutiennent l’idée d’un retour contrôlé de l’Autorité palestinienne. D’autres y voient une illusion dangereuse, estimant que Ramallah n’a ni l’autorité, ni la crédibilité, ni les capacités logistiques pour assumer Gaza.
Pour l’heure, la proposition européenne s’apparente davantage à une piste diplomatique qu’à un dispositif immédiatement applicable. Mais elle montre que Bruxelles veut s’installer dans le débat international sur l’avenir du territoire, à un moment où Washington, Le Caire et Doha occupent l’essentiel de l’espace médiateur. En soutenant la création d’une force civile palestinienne, l’UE cherche aussi à envoyer un message politique : l’après-guerre doit s’appuyer sur une solution palestinienne, et non sur des configurations temporaires qui perpétueraient le statu quo.