Au cœur de la proposition : un contrat par lequel Israël fournirait environ 25 % des besoins en électricité de l’Égypte grâce à ses exportations gazières. Le géant américain Chevron est pressenti pour jouer un rôle clé dans ce projet qui s’inscrirait dans la poursuite de l’exploitation des gisements israéliens de Méditerranée orientale.
Du côté égyptien, la décision est déjà prise. Abdel Fattah al-Sissi a donné son feu vert à l’accord dès le mois de juillet, en dépit de critiques internes et régionales. À Jérusalem, en revanche, le dossier traîne. Une source israélienne pointe « des calculs de politique intérieure » et la volonté de Benyamin Netanyahou de transformer la signature en événement symbolique, face au président égyptien, sur le sol égyptien.
Pour l’administration Trump, cet accord va bien au-delà d’un simple contrat énergétique. Il s’agit d’une pièce maîtresse d’une stratégie plus large, destinée à sortir Israël de l’isolement diplomatique renforcé par la guerre à Gaza. Un responsable américain parle d’un « nouveau modèle de diplomatie économique », où gaz, technologie et intelligence artificielle deviennent autant d’outils pour reconstruire des partenariats régionaux.
L’initiative américaine ne se limite pas à l’axe Israël–Égypte. Elle évoque aussi le Liban, la Syrie et l’Arabie saoudite, avec une ambition : consolider les économies de la région et relancer, par ricochet, les dynamiques politiques, notamment celles des accords d’Abraham, sérieusement bousculés depuis le 7 octobre.
Jared Kushner, gendre de Donald Trump redevenu très actif sur le dossier moyen-oriental, a récemment appelé Benyamin Netanyahou. Son message se veut clair : les capitales arabes « cherchent des opportunités d’affaires, pas seulement des discussions sur l’Iran ». Selon lui, Israël doit renforcer sa « diplomatie économique » et prouver qu’il reste un partenaire attractif, capable d’apporter gaz, savoir-faire technologique et investissements.
En toile de fond, les relations israélo-égyptiennes se sont nettement refroidies depuis le début de la guerre à Gaza. Les deux dirigeants n’auraient plus échangé directement depuis des mois. Netanyahou a même renoncé à participer à un sommet pour la paix à Charm el-Cheikh en octobre, décision très mal reçue au Caire. Pourtant, l’Égypte reste un acteur incontournable de la crise. Elle continue de jouer un rôle central dans la médiation entre Israël et le Hamas. C’est grâce à cette médiation que l’accord sur les otages a permis le rapatriement en Israël des dépouilles de 27 des 28 soldats dont les corps étaient retenus dans la bande de Gaza.
Si le sommet Netanyahou–al-Sissi se concrétise, il matérialisera le retour d’Israël au centre du jeu régional par la voie de l’énergie. Mais l’opération reste politiquement sensible : le Caire doit ménager une opinion publique hostile à Israël, et Netanyahou doit composer avec une coalition divisée et des partenaires craignant toute concession, même sous emballage gazier.
Entre diplomatie du pipeline et guerre des narratifs, la Maison-Blanche espère malgré tout transformer un contrat de gaz en levier stratégique. Reste à voir si les intérêts politiques des deux dirigeants les pousseront à poser ensemble sur la photo.