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Recours rejeté : la CPI inflige un coup dur à Israël

La Cour pénale internationale a rejeté l’appel d’Israël sur la procédure d’enquête liée à Gaza, Jérusalem dénonce une décision « politisée », qui bafoue le principe de complémentarité et les droits d’un État doté d’un système judiciaire indépendant.

4 minutes
15 décembre 2025

ParNathalie Sosna Ofir

Recours rejeté : la CPI inflige un coup dur à Israël
CPI

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La Cour pénale internationale de La Haye a rejeté ce lundi un recours israélien portant sur l’exigence de recevoir une « notification préalable » supplémentaire dans le cadre des procédures liées à l’enquête internationale sur la guerre à Gaza. La décision a été prise à la majorité des juges. Concrètement, elle signifie que le bureau du procureur n’est pas tenu de rouvrir la procédure ni d’adresser à Israël une nouvelle notification au titre de l’article 18(1) du Statut de Rome, article lié au principe de complémentarité.

Au cœur du recours figurait l’argument israélien selon lequel les développements intervenus depuis l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023 constituent une « situation nouvelle », imposant au procureur de répéter l’étape procédurale de notification préalable à l’État concerné. Israël s’appuyait sur le principe de complémentarité, selon lequel la compétence de la Cour doit être subsidiaire et, lorsqu’un État mène une enquête ou une procédure judiciaire authentique et effective, celle-ci doit primer sur toute intervention extérieure.

La chambre d’appel n’a pas retenu cet argument et a estimé qu’il n’existait aucun fondement à l’obligation d’une « nouvelle notification » telle que demandée par Israël, ni de changement justifiant une « réinitialisation » du mécanisme. Cette décision lève ainsi un obstacle majeur qu’Israël tentait d’opposer au procureur dans le cadre du dispositif procédural de l’article 18, destiné à permettre à un État d’indiquer qu’il enquête lui-même sur les faits en cause et de demander au procureur de suspendre ou de différer ses démarches.

La décision rendue aujourd’hui s’inscrit dans une série de procédures judiciaires engagées par Israël devant la Cour, visant à restreindre ou à ralentir ses actions. Au cours de l’année écoulée, des mandats d’arrêt ont été délivrés dans ce dossier contre le Premier ministre Benyamin Netanyahu et l’ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. Ces mandats demeurent en vigueur malgré la décision actuelle. Par le passé, plusieurs recours et demandes ont également porté sur l’étendue de la compétence de la Cour et sur la possibilité de suspendre les procédures dans l’attente de l’examen de questions préliminaires, sans que la CPI ne stoppe l’avancement du dossier.

En toile de fond persiste le désaccord de principe entre Israël et la Cour. Israël n’est pas partie au Statut de Rome et soutient que la CPI n’a aucune compétence à son égard, soulignant que son système judiciaire est indépendant et capable d’examiner les accusations en interne. À l’inverse, le bureau du procureur considère que la « situation en Palestine » relève de sa compétence et poursuit les procédures dans le cadre de l’enquête en cours.

Selon la décision, l’enquête relative à la « situation en Palestine » a été ouverte en 2021, à la suite d’une saisine de la Cour datant de 2018, et une notification au titre de l’article 18(1) avait également été adressée à Israël. Après le 7 octobre 2023, de nouvelles requêtes ont été déposées auprès de la Cour. Israël a alors demandé au procureur de suspendre les actes d’enquête concernant des faits imputés à des ressortissants israéliens ou à d’autres personnes relevant de sa compétence, mais le procureur a répondu que la demande ne respectait ni le calendrier ni le cadre procédural requis. Israël s’est ensuite tourné vers la Cour pour solliciter une injonction obligeant le procureur à émettre une nouvelle notification au titre de l’article 18(1). Cette requête avait été rejetée en novembre 2024 ; l’appel formé contre cette décision vient à son tour d’être rejeté.

Le ministère israélien des Affaires étrangères a vivement réagi à la décision : « Israël rejette la décision de la chambre d’appel de la Cour pénale internationale, adoptée à une courte majorité, visant à priver Israël du droit de recevoir une notification préalable - un droit requis par le principe de complémentarité, en particulier lorsqu’il s’agit d’un État démocratique doté d’un système judiciaire indépendant et solide. Il s’agit d’un nouvel exemple de politisation persistante de la Cour et d’un mépris flagrant pour les droits souverains des États non parties au Statut, ainsi que pour ses propres obligations au titre du Statut de Rome. Voilà à quoi ressemble une politique déguisée en ‘droit international’. »

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