Société

Grave pénurie d'enseignants

Selon des estimations du secteur éducatif, il manquerait environ 20 000 enseignants dans les écoles israéliennes, dont 5 000 physiquement absents et plusieurs milliers sous-qualifiés

4 minutes
11 juillet 2025

ParNathalie Sosna Ofir

Grave pénurie d'enseignants
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La pénurie d’enseignants continue de peser lourdement sur le système éducatif israélien. Face au manque criant de personnel, le ministère de l’Éducation a refusé d’accorder un congé sabbatique à 1 559 enseignants pour l’année scolaire 2025-2026. Des milliers de postes restent vacants et les chefs d’établissement se retrouvent à lancer des appels à l’aide désespérés. Certains, comme le directeur du lycée municipal D de Tel Aviv, ont même sollicité les parents d’élèves pour recruter des professeurs. « Les gens ne veulent plus enseigner », résume-t-il.

Dans les écoles, la situation oblige à des solutions d’urgence : suppression de certaines matières, fusion de classes, recours à des sociétés de cours à distance ou encore diffusion d’annonces de recrutement sur les réseaux sociaux. Le ministère de l’Éducation affirme de son côté renforcer le recrutement de jeunes en service militaire dans l’enseignement et intégrer davantage d’étudiants en cours de formation.

Un appel à l’aide inédit aux parents

« Pénurie d’enseignants — appel à l’aide » : c’est ainsi qu’Ouri Less, directeur du lycée municipal D dans le nord de Tel Aviv, a intitulé le mail adressé récemment aux parents. Il y écrit :
« Il nous manque des professeurs pour le collège en mathématiques, arabe, Bible et compétences linguistiques. Si vous connaissez quelqu’un d’intéressé, merci de me contacter directement par WhatsApp. »
Une démarche inhabituelle qui témoigne de la gravité de la situation. Et Ouri Less n’est pas le seul directeur à recruter via ses connaissances, les réseaux sociaux ou des agences spécialisées dans l’enseignement à distance. Fini le temps où le ministère orientait des cohortes d’enseignants vers les établissements : aujourd’hui, il faut convaincre, séduire et parfois accepter des compromis.

20 000 enseignants manquent à l’appel

Selon des estimations du secteur éducatif, il manquerait environ 20 000 enseignants dans les écoles israéliennes, dont 5 000 physiquement absents et plusieurs milliers occupant des postes sans qualifications adéquates. Sur 6 713 enseignants ayant demandé à bénéficier d’une année sabbatique l’an prochain, 1 559 ont reçu une réponse négative du ministère, faute de remplaçants. Et 601 demandes sont encore à l’examen.

Avec le début des vacances d’été, les chefs d’établissement se sont précipités sur le marché du travail pour tenter de recruter à temps. « C’est une crise nationale », martèle Ouri Less dans un entretien avec ynet. « Les gens ne veulent plus devenir enseignants et il est de plus en plus difficile de pourvoir les postes vacants. Dans certaines écoles, il manque jusqu’à 10 % du personnel éducatif. Les directeurs doivent faire des concessions sur la qualité des recrues, fermer des groupes d’élèves ou créer des classes surchargées pouvant atteindre 39 élèves. »

Des solutions de fortune pour un système à bout de souffle

Dans de nombreuses écoles, des enseignants assurent plusieurs classes à la fois, certaines matières sont supprimées et les élèves libérés plus tôt. Des filières entières disparaissent, tandis que les enseignants remplaçants se succèdent à un rythme effréné. En février dernier, un rapport révélait que près de 12 000 enseignants exerçaient sans diplôme officiel : plus de 6 000 d’entre eux sont titulaires d’un diplôme universitaire mais sans formation pédagogique complète.

Malgré les multiples alertes lancées ces vingt dernières années, la crise s’aggrave. Iris Doron, présidente du syndicat des directeurs des lycées, résume : « Ce n’est pas une difficulté passagère, c’est une crise structurelle profonde. Nous devons parfois choisir entre ne pas enseigner une matière ou confier une charge excessive à nos professeurs déjà épuisés. »

Des élèves sans repères et des enseignants au bord de l’épuisement

Ce refus massif des congés sabbatiques a un coût humain. « Cela laisse dans le système des enseignants épuisés, frustrés, privés de pause », déplore un directeur d’école. Il raconte comment, dans une seule classe, quatre enseignants principaux se sont succédé au cours de l’année, laissant les élèves sans repères ni stabilité émotionnelle.

Une alerte pour toute la société israélienne

Beaucoup d'enseignants sont sous-qualifiés ou à bout de forces. Dans ces conditions, il est impossible de mener des apprentissages de qualité. La situation est aggravée par le taux d’abandon très élevé des jeunes enseignants, nombreux à quitter le métier dès leurs premières années.

La réponse du ministère de l’Éducation

Le ministère assure qu’il cartographie actuellement les besoins dans toutes les régions et rappelle qu’à la rentrée précédente, après un vaste plan de recrutement, le déficit a été réduit à 500 enseignants, contre 10 000 estimés au départ. Mais nombreux sous-qualifiés. Cette année encore, des mesures sont mises en place : renforcement du programme des jeunes enseignants en service militaire, intégration des étudiants dès leurs études et reconversion professionnelle d’universitaires, notamment en mathématiques et en anglais.