International

Les défis de Téhéran et le dilemme d’Israël : le point sur les efforts de reconstruction iraniens

Téhéran a fait un choix stratégique clair : reconstruire en priorité son arsenal de missiles balistiques, perçu comme son meilleur bouclier et comme un moyen de tenir Washington à distance. Atout clé pour l’Iran : une production entièrement nationale. Face à cette réalité, Israël est placé devant un choix décisif : tenter la voie d’un accord nucléaire ou se préparer à des affrontements réguliers, tous les quelques mois.

4 minutes
21 décembre 2025

ParNathalie Sosna Ofir

Les défis de Téhéran et le dilemme d’Israël : le point sur les efforts de reconstruction iraniens
L’Iran a entamé la remise en état de ses installations de production et de développement de missiles balistiques,

Désolé, votre navigateur ne supporte pas la synthèse vocale.

Six mois après la fin de l’opération « Am Ke'lavi », les signaux se multiplient ces derniers jours indiquant que l’Iran poursuit son renforcement militaire, ce qui pourrait pousser la région vers une nouvelle escalade. Samedi, la chaîne NBC rapportait que des responsables israéliens s’inquiètent de la reconstruction du dispositif de missiles balistiques iraniens, endommagé par Israël durant la guerre. Dans nos éditions, Israël a rappelé considérer cet arsenal comme une menace existentielle.

Priorité absolue : le dispositif de missiles

Dès le début de la confrontation avec l’Iran, le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait qualifié la menace des missiles balistiques iraniens d’« existentiale et immédiate ».
En 2022, les États-Unis estimaient que l’Iran disposait d’environ 3 000 missiles balistiques, tandis que Netanyahu alertait sur l’ambition iranienne d’atteindre les 20 000 missiles. Durant la guerre, environ la moitié des lanceurs ont été détruits, tout comme des sites de production et une partie de l’arsenal, déjà mis à rude épreuve par les tirs massifs iraniens. Le dispositif a été sérieusement endommagé, mais l’Iran parvient à se reconstruire rapidement – peut-être plus vite que prévu – grâce à son savoir-faire autonome. La production locale des missiles facilite grandement cette reconstruction.

Le principal problème pour Israël réside dans la capacité iranienne à se relever : Israël a éliminé Amir Ali Hajizadeh, responsable du programme de missiles, mais l’Iran peut compenser : le savoir repose sur des millier d’ingénieurs. Et comme ils partent du principe que la prochaine guerre n’est qu’une question de temps, ils travaillent quasiment 24 heures sur 24 à la reconstitution de leurs capacités. D'après les experts, d’ici un an, l’Iran pourrait effacer l’un des principaux succès israéliens de l’opération :NBC a également rapporté que, sans entrave, l’Iran pourrait accroître sa capacité de production jusqu’à environ 3 000 missiles par an – un chiffre contesté par certains experts. Même s’il est exagéré, il illustre la rapidité potentielle de la reconstruction. S’il s’avérait exact, l’Iran pourrait rétablir l’ensemble de son dispositif en l’espace d’un an.

Missiles plutôt que nucléaire

Parallèlement, Israël et l’Iran se livrent à une course entre la production de missiles iraniens et celle des intercepteurs israéliens, après l’usure des deux stocks durant la guerre. L’Iran a fait le choix stratégique de privilégier les missiles, notamment en raison de l’absence d’un front totalement uni entre Israël et Washington sur ce dossier. Si Donald Trump s’est engagé à empêcher l’Iran d’accéder à l’arme nucléaire, il s’est montré beaucoup moins catégorique concernant le programme balistique. Concernant le nucléaire, des indices montrent que l’Iran tente de relancer certaines installations à bas régime, mais Téhéran reste loin d’un rétablissement complet. Les évaluations internationales divergent sur l’ampleur des dégâts, certains estimant que l’Iran s’est éloigné de son objectif de plusieurs mois, voire de plusieurs années. D'après les experts, les dirigeants iraniens craignent qu’un retour à l’enrichissement intensif d’uranium n’entraîne une confrontation directe avec Israël et les États-Unis : « Ils n’ont pas encore tranché sur le nucléaire. Ils privilégient les missiles, car ils estiment que c’est avant tout cela qui les protégera face à Israël. L’enrichissement ne leur offrirait pas de véritable parapluie nucléaire. » L’Iran cherche également à restaurer ses systèmes de défense aérienne, largement neutralisés durant la guerre. Là encore, Israël se dit préoccupé par ces efforts. Téhéran est convaincu que « la meilleure défense reste l’attaque » : renforcer l’offensive pour dissuader Israël ou l’obliger à interrompre toute campagne militaire.

Le dilemme stratégique d’Israël

Selon les informations publiées aux États-Unis, Netanyahu devrait présenter à Trump plusieurs options d’action contre l’Iran lors de sa prochaine visite à Washington. Israël se retrouve toutefois face à un dilemme stratégique : soit adopter une politique menant à des confrontations répétées tous les quelques mois, avec un coût élevé pour l’économie et le front intérieur ; soit accepter un accord nucléaire avec un régime iranien qui, à ce stade, refuse de répondre aux exigences occidentales.

Une nouvelle confrontation serait plus complexe et offrirait moins de bénéfices que la précédente analyse un expert de L'Institut israélien d'études de sécurité nationale: « Nous avons compris que nous ne pouvions pas faire tomber le régime, et en face, l’Iran dispose d’une capacité autonome de développement de missiles. Dans ces conditions, l’utilité réelle d’une nouvelle campagne reste très incertaine. »

Tags